Addict

Promis, si je sors vivant de cette aventure-là, à mon retour je ne lirai plus rien qui fait peur. Fini les histoires de meurtres, de monstres et de zombies. Je choisirai uniquement des livres qui finissent bien, avec des licornes magiques et des princesses à paillettes.
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vendredi 29 mars

Contenu

Non fiction - Thriller

Addict

Disparition - Faits divers MAJ jeudi 26 juillet 2018

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 20 €

James Renner
True Crime Addict: How I Lost Myself in the Mysterious Disappearance of Maura Murray - 2016
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Caroline Nicolas
Paris : Sonatine, août 2017
318 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-35584-628-1

Le crime dans ma tête

En France, on commence à connaître l'écriture journalistique gonzo mise à la mode par Hunter S. Thompson. Elle consiste en un récit en immersion à la première personne avec point de vue forcément subjectif. La formule se décline désormais dans la sous-catégorie true crime. Contrairement aux faits sociaux, la catégorie "crime véritable" entre en opposition avec le courant gonzo en raison des codes rigides et de la prorédure d'une enquête reposant essentiellement sur des preuves. Le journaliste James Renner a parfaitement réussi cette synthèse.
Auteur de deux romans, il est surtout connu pour ses récits de true crime dont le premier Amy: My Search For Her Killer (2006) est consacré à l'affaire Amy Mihaljevic, une préadolescente blonde dont James Renner, lui-même préadolescent, dit être tombé amoureux quand il a vu les avis de recherche. La jeune femme Maura Murray est un autre cas non résolu qu'il a couvert sur des années et dont il rend compte ici. En 2004, la voiture de cette élève infirmière, à des centaines de kilomètres de chez elle, percute un talus neigeux sur une route de montagne. Un chauffeur de bus scolaire lui propose son aide qu'elle décline. Il habite tout près dans l'une des maisons où d'autres témoins voient la scène et appelle la police qui arrive sept minutes plus tard. Maura Murray a disparu pendant ce laps de temps. Aucune empreinte vers la forêt. Malgré les fouilles et les enquêtes auprès de sa famille, de son fiancé et de ses amis, on ne la retrouvera jamais. Six ans plus tard, en 2010, James Renner se lance dans son enquête en créant un blog et en reprenant tout à zéro...
Comment écrire un page turner qui n'est pas un roman mais un true crime sans cadavre ? James Renner le réussit haut la main et c'est un tour de force. Certainement bien traduit par Caroline Nicolas, le style de James Renner brut, parlé, aux phrases courtes, aux chapitres titrés eux aussi très courts, est d'une efficacité sidérante. La recette ? Une aisance incroyable dans les techniques d'écriture, le découpage, l'interpellation du lecteur, les points de vue... Est-ce de la littérature, avec ce vocabulaire basique et ces phrases simplissimes ? Le débat est ouvert mais, en tout cas, c'est un discours qui se tient. Car l''auteur est lui-même un cas, et son implication dans le récit est telle qu'il parvient à en faire aussi un récit de sa vie.
C'est une énorme gageure. Bien des auteurs "littéraires" (Adrien Bosc dans Constellation, Laurent Binet dans HHhH pour ne citer qu'eux) s'y sont cassé les dents. James Renner, lui, a réussi !
Impossible de détailler l'enquête qui court sur six ans jusqu'en 2016, année de la publication du livre. Plus que les rencontres des membres de la famille, des amis et connaissances de Maura, les déplacements, les détails géographiques, c'est l'acharnement de James Renner qui provoque cette fascination. Tout en ne perdant jamais le fil conducteur de son enquête, avec des commentaires pertinents sur les attitudes ambiguës de certains, dont le propre père de la victime, James Renner dresse un tableau stupéfiant de sa vie de famille avec son enfant en maternelle au comportement violent et anormal, et de son histoire familiale avec cette agression d'un pédophile dont il parvint à se débarrasser. Avec l'histoire de son grand-père qui viola tous ses enfants et même quelques petits-enfants pendant de longues années, et les morts ou disparitions terribles de jeunes filles dans son coin de Cleveland, comment s'étonner que James Renner prenne des tranquillisants, de l'herbe, de l'alcool et tombe dans la dépression régulièrement ?
L'autre grand étonnement de ce récit est l'obtention des informations personnelles qui, aux États-Unis, sont loin d'être protégées. Au contraire ! Identité, anciens noms, numéro de sécurité sociale, permis de voiture, immatriculation véhicule, casier judiciaire, profil scolaire, professionnel, groupe sanguin, dossier sanitaire mais aussi dossier d'enquête, rapports d'audition, pièces à conviction, etc. Tout semble disponible par Internet pour un journaliste et même un particulier. Les lois sur la liberté d'information obligent les agences américaines à fournir toutes les pièces demandées et c'est à elles, nous apprend une note p. 190, de demander une dérogation et d'argumenter quand elles veulent garder un élément secret.
De plus, James Renner n'est pas seul. Comme, dit-il, Sherlock Holmes avec ses gamins des rues qui jouaient ses indicateurs, lui aussi a ses Irréguliers : les visiteurs de son site et de ses blogs où il balance tout, au grand dam des personnes nommées qui se retrouvent ainsi dépouillées de leur intimé en quelques clics.
En conclusion, c'est un texte effarant.

Citation

Une ambitieuse détective du nom de Samantha s'est emparée du numéro de compte de la carte Stop&Stop de Maura et l'a tapé sur le site de la compagnie.

Rédacteur: Michel Amelin vendredi 22 septembre 2017
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