La Cour des mirages

Sa mort était possible. Probable. Mais pas certaine. On a dit qu'il avait été arrêté par la police militaire. Qu'il avait été abattu dans une de ces iles de la frontière uruguayenne, ou dans un coin désert des faubourgs de Buenos Aires ou de La Plata. D'autres ont affirmé qu'il avait été trahi par un de ses compagnons. On a aussi raconté qu'il avait été jeté vivant d'un avion.
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Roman - Noir

La Cour des mirages

Politique - Procédure - Trafic MAJ samedi 16 avril 2022

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 22,9 €

Benjamin Dierstein
Paris : Les Arènes, janvier 2022
848 p. ; 22 x 16 cm
ISBN 979-10-375-0571-2
Coll. "Equinox"

Voyage au bout des enfers

En cette période d'élections, revenons quelques années en arrière, plus exactement deux quinquennats. Nous sommes en 2012, Nicolas Sarkozy vient de laisser son fauteuil présidentiel et au sein des forces de police, surtout parmi la hiérarchie, les rumeurs commencent à circuler. Qui va rester ? Qui va être promu ? Qui va surtout être envoyé sur une voie de garage pour avoir trop facilement travaillé pour le pouvoir qui vient de perdre ? C'est dans ce contexte que certaines huiles vont "mettre à l'abri" la commandante Laurence Verhaeghen en la transférant de la DCRI vers la brigade criminelle de Paris. Ils espèrent que, depuis là, elle pourra aussi veiller leurs arrières et éviter les coups bas qui ne vont pas manquer d'arriver. Là-bas, Laurence Verhaeghen intègre un groupe où vient également d'arriver Gabriel Prigent. Ce dernier semble plutôt borderline, peu net et sujet à des crises de violence ou de travail en solitaire qui pourraient mettre à mal les enquêtes. De fait, en fouillant, les collègues comprennent pourquoi. Quelques années plus tôt, Gabriel Prigent était avec sa fille dans le métro quand un individu non identifié a réussi à l'éloigner de son père, puis à l'enlever. En enquêtant chez les pédophiles et leurs réseaux, il a vu passer des photos de sa fille, pense qu'elle est encore vivante et cherche à tout prix à la retrouver. Cela lui a valu le divorce d'avec sa femme et ses relations tendues avec leur deuxième fille. À peine installés, les deux nouveaux et leur équipe doivent enquêter sur une mort mystérieuse. Un élu socialiste se serait suicidé après avoir tué femme et enfant. Mais les doutes planent, et certains y voient un meurtre pour couvrir des affaires de fraude ou d'optimisation fiscale (et c'est l'occasion pour les supérieurs de la commandante Laurence Verhaeghen d'essayer de détourner l'attention de leurs propres turpitudes et celle de l'ancien pouvoir), mais d'autres pistes sont possibles car le mort était lié à des réseaux sexuels sans auxun doute classiques, mais faisant peut-être appel à des voleurs d'enfants. Entre des ordinateurs chargés de matériel pédophile, des affaires de pognon et de renvois d'ascenseur, la volonté des supérieurs soit de vouloir enterrer les choses soit au contraire de soulever des lièvres, l'enquête s'avère peuplée de chausse-trappes, de coupables voulant assurer leurs arrières en détruisant les preuves et les témoins. Mais ils vont également devoir face à une double volonté : celle de Laurence Verhaeghen de faire son métier et de retrouver sa dignité, et celle de Gabriel Prigent de débusquer des coupables qui cachent peut-être encore sa fille et en abusent.

Dans ce nouvel opus, nous retrouvons tout ce qui fait la force de Benjamin Dierstein, à savoir une écriture nerveuse et hachée, n'hésitant pas à user de répétitions, à mélanger des passages descriptifs (parfois à la limite de l'insoutenable, et parfois les dépassant) soudain coupés par des monologues intérieurs où se révèlent le désarroi et la folie des personnages. Le mélange entre les éléments politiques, revus dans une autre perspective (ici, de très bons passages ou des allusions à "L'Affaire Cahuzac", aux balades en scooter de l'ancien président à l'historique des réseaux pédophiles et de leur lien avec les soixante-huitards) pour présenter une intrigue complexe, faite de bruits et de fureurs, où l'auteur n'hésite ni à raconter un fait "scabreux", ni à rendre ses personnages sympathiques malgré leur folie et à décrire leur plongée, jusqu'aux vertiges extrêmes (désolé de ne pas dire plus, mais ce serait stupide de divulgâcher les trajectoires de deux personnages centraux). Ce style noir, proche de celui de James Ellroy, mais sans vaine imitation, juste le sentiment du besoin vital d'écrie de cette façon, crée l'écrin superbe d'une histoire noire, sombre jusqu'à la nausée, poursuivant une œuvre forte et particulière qui mérite de figurer dans toute bibliothèque.

Nominations :
Le Noir de l'Histoire 2022

Citation

Une ordure de première qui a mal assuré ses arrières- des indics de Verhaeghen ont réussi à le retrouver...
Une ordure de première qui va enfin payer - pour avoir intimidé Verhaeghen quand elle était sous ses ordres - pour l'avoir menacée quand elle a essayé de le foutre sous les verrous - pour avoir menacé sa fille Océane...

Rédacteur: Laurent Greusard samedi 16 avril 2022
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