Autant le reconnaître, le pitch du nouveau San-Antonio nous faisait peur avant même d'avoir défloré le book : suite à l'assassinat de différents membres de l'équipe d'un film X, San-A et Bérurier mènent l'enquête selon une méthode bien établie : l'infiltration. L'Ignoble rejoint donc le tournage en tant que hardeur pour enquêter incognito.
Pourquoi donc cette crainte post lecture ? Immerger Bérurier dans des milieux propices au décalage comique est une ficelle vieille comme Hérode, dument exploitée par Dard, père et fils, avec quelques titres d'anthologie. Quand une recette est bonne, pourquoi en changer ? D'autant que Berthe Bérurier est amenée à suppléer à son tour une actrice défuntée. Donc banco de principe.
C'est en revanche la corporation choisie qui nous faisait craindre le pire : celle des boulards et autres films de poutre. On se souvient en effet d'une sortie de Patrice Dard, il y a quelques années déjà, qui s'énervait contre ceux qui lui reprochaient de mettre moins de cul dans ses nouvelles aventures, et qu'il se sentait obligé d'en rajouter pour faire plaisir à tout le monde.
Aïe, aïe, aïe ! Était-ce à dire que dans Contre X, on allait assister, le thème aidant, à une surenchère blasée dans le graveleux, à une triste hyperbole pubienne, à un geyser d'émissions séminales allant à l'encontre de l'essence même du sexe san-antonien ?
Car ce qu'il faudrait qu'on se carre dans le crâne, une bonne fois pour toutes, c'est que passé quatorze ans, on ne lit plus les San-A pour se pignoler. Que, à de rares exceptions près, les scènes de baise sont hénormes, rabelaisiennes, second, troisième, voire quatrième degré. Qu'elles sont avant tout drôles, avant que d'être bandantes. Et que pour se taper un rassis, autant lire un « Brigade Mondaine » où tout est à prendre au pied de la lettre. Alors qu'est-ce qui nous attendait dans celui-ci ? Ȧ quoi s'attendre avec Béru en digne successeur de Rocco et ses sœurs ?
Ma foi, bien joué, l'artiste ! Jolie pirouette de Patrice Dard : on nous vend ce San-A comme sulfureux, et à l'arrivée, par une seule scène de sexe ! Ȧ peine deux rapports bucco-génitaux tout juste entamés, même pas achevés. Pour le reste : fume, c'est du Belge ! Qu'on aurait presque envie d'offrir des petites pilules bleues au beau commissaire. L'auteur nous prend joliment à contre-pied, et nous voici rassurés. Oh, bien sûr, le cul est présent. Mais évoqué, suggéré, à l'état de prémices, et toujours drôle, bref, comme il doit l'être dans un San-Antonio digne de ce nom.
Mais il n'y a pas que le cul, dans la vie, nous direz-vous ! Et le reste du book, alors ? Début très prometteur, fils narratifs lâchés dans toutes les directions, caution san-antonienne avec les interventions de Béru et de sa Baleine (mais pourquoi diable Patrice Dard ne l'utilise-t-il pas autant ? C'est certainement le personnage secondaire de la geste qu'il maîtrise le mieux), des métaphores et des comparaisons qui font mouche, plus aucune digression, peu d'états d'âme et un final précipité et grand-guignolesque.
La routine, quoi.