Contenu
Poche
Inédit
Tout public
292 p. ; 17 x 11 cm
ISBN 978-2-7436-2110-0
Coll. "Noir", 781
Qui veut la peau de Jésus ?
Palestine, en l'an 28 de notre ère. Un jeune charpentier, Yeshua, se repose lorsqu'il est victime d'une tentative de meurtre. Il s'enfuit et cherche à découvrir qui l'a attaqué. Dans le même temps, Imanouel, un noceur, fils de famille, est lui aussi attaqué...
Ces dernières années, on a assisté à une recrudescence des romans mettant en scène le Christ et les mystères que sa vie recouvre, les complots et les sectes qui l'entourent, sa descendance. Jean-Marie Villemot, qui en parallèle nous raconte une série policière dont le personnage central est Abel Brigand, un prêtre, nous offre-là un roman, au contraire, d'un réalisme saisissant.
Tout d'abord, il s'agit de reconstituer un monde ancien, exotique, à tous les points de vue : que ce soit des décors qui sont sans doute les mêmes aujourd'hui, mais aussi des mentalités empreintes de la foi messianique de ce siècle, des différences culturelles entre l'esprit d'un artisan du premier siècle et le lecteur du XXIe. Dans L'Évangile obscur, Jean-Marie Villemot parvient avec une économie de moyens et un style souvent lapidaire à restituer une atmosphère sans doute proche de celle de l'époque qu'il décrit, comme Pier Paolo Pasolini avait réussi à le faire filmiquement parlant, où René Réouven dans son Tobie or not tobie. Yeshua, pour échapper à son assassin, se réfugie dans une communauté d'esséniens. En quelques phrases, l'auteur nous fait sentir combien le groupe est sectaire, rude et replié sur lui-même.
Ce soin du réalisme s'applique également à son intrigue. Depuis de longues années,des questions se posent sur les origines du christianisme et principalement sur les contradictions qu'il est possible de déceler entre les différents évangiles, entre les parole rapportées à un moment ou à un autre et mises dans la bouche du Christ (et la synthèse de ces interrogations, la plus aboutie fut la série "Corpus Christi"). Difficile de concilier les messages d'amour de certains passages et ceux qui prônent l'épée, et beaucoup s'y sont cassés les dents. Jean-Marie Villemot parvient à proposer une solution satisfaisante, logique, qui, par d'habiles retours en arrière, lie la naissance du Christ et sa mort, annonce (sans jamais en parler) les grands moments de sa vie, car l'énigme policière se résout au moment où Jean-Baptiste baptise le Christ (dans une scène finale sur le martyr assumé très forte).
Jean-Marie Villemot se permet même le luxe, de proposer une solution elle aussi très excitante pour l'esprit, autour de Judas, disciple et traitre par amour (à rapprocher pour les amateurs du superbe Judas de Léonard, un roman de Leo Perutz) et cet évangile remplit bien sa mission : celle de compléter les trous de la narration biblique, d'offrir un pont qui relie l'ensemble des éléments des quatre évangiles canoniques et offrir ainsi le chapitre qui clôture l'aventure christique, en en faisant un tout romanesque intelligent et crédible, tout en respectant la foi ou la non-foi. Et il accomplit ce "miracle" en ne négligeant pas son intrigue, en ne se livrant à aucun prosélytisme, dans une spectaculaire leçon de littérature maitrisée dans son fond et sa forme.
Citation
Quand la croix est dressée, les assistants hissent le condamné désarticulé. Ses jambes se mettent à pendre à deux coudées du sol. Son cri déchire l'air.