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Trois guerres pour Emma
240 p. ; 20 x 13 cm
ISBN 978-1-935558-74-3
Les mystères de la Commune
Lors de la guerre mexicaine, les troupes françaises pour couper court aux résistances des rebelles ont lancé des petits groupes chargés de faire peur aux velléitaires. Parmi ces groupes, l'un d'eux s'est rendu célèbre en dessinant au poignard une cicatrice en forme de diable sur les visages des prisonniers. La guerre s'est achevée et les soldats revenus en France. Mais l'un d'eux sans doute, obnubilé par ce qu'il a vécu, a repris cette habitude décorative sur les femmes parisiennes... Passe-Mur, un policier, a failli l'arrêter et les deux hommes se sont mutuellement blessés pendant le combat. Depuis le policier veut se venger.
1870. Paris est assiégé. Le gouvernement veut liquider les révolutionnaires et envoie Passe-Mur pour les faire disparaître. En même temps, le policier profite des troubles pour rechercher son tueur en série. Son chemin mortel va croiser la route d'Emma, jeune institutrice communarde prise entre deux amours et qui se refuse à choisir.
Le roman brasse les périodes et les genres. Si l'essentiel du texte se déroule en 1870, le combat au Mexique est rapporté, et après la Commune, les personnages se retrouvent dans l'Ouest américain, pour évoquer la bataille de Little Big Horn. Trois guerres pour Emma est un roman historique dans la mesure où François Darnaudet s'appuie sur une documentation, et reconstitue de façon convaincante les univers qu'il décrit. D'une part la Commune, les luttes révolutionnaires avec les forces conservatrices françaises pour la grande Histoire et les démêlés de l'héroïne qui doit inventer une nouvelle façon de vivre, plus féministe et plus libre, auprès de ses deux compagnons. D'autre part, les derniers jours de Custer et de ses hommes, une période que François Darnaudet arpente avec ferveur.
Le roman est aussi un roman policier avec son personnage de flic chargé des basses besognes et qui les accomplit sans remords en même temps qu'il sert de guide pour visiter les bas-fonds de la société. C'est également un roman populaire, au sens d'Eugène Sue, avec ses héros gangrenés par la vengeance, par les barrières sociales, par ses thèmes du frère jumeau ou des luttes gargantuesques dans les tripots. Un exemple parmi d'autres : Passe-Mur sait que le coupable a perdu une oreille. Il retrouve un noble ayant servi dans l'armée mexicaine et s'aperçoit qu'il lui manque effectivement une oreille. Il le tue pour découvrir qu'en fait il manque les deux à ce héros de la guerre !
C'est aussi un texte qui n'oublie pas de créer des personnages vivants. Ainsi Emma acquiert en quelques pages une densité d'héroïne forte. François Darnaudet dessine à travers des petites touches les relations complexes d'Emma avec ses deux amants, empreints de naturel ou la façon dont justement les deux hommes vont accepter la situation. Car François Darnaudet (que certains connaissent pour des romans à cheval sur plusieurs genres ou pour un "Poulpe" - il paraît qu'un autre devrait arriver !) sait raconter une histoire et rendre vivant une scène ou un personnage.
Il serait dommage qu'en refusant de se laisser enfermer dans des cases littéraires étroites et en publiant ce roman chez un éditeur plutôt spécialisé dans la SF, Trois guerres pour Emma passe inaperçu des amateurs d'histoires policières car ce roman n'hésite pas à brasser des thèmes populaires, et à ancrer son intrigue dans des réalités historiques fortes dans cette Commune qui fut un moment si important de notre Histoire.
Citation
Un mois d'hiver, on trouva la tête d'Arsène, énuclée, sur un tas d'immondices. Son corps avait été à moitié mangé par de chiens errants, quelques centaines de mètres plus loin.