Ça baigne dans le béton

C'est à ce moment-là, d'un geste lent qui décuplait son plaisir, que l'homme sortit un pistolet de sa poche. Il en caressa la crosse d'un noir brillant. Son extrémité ternie par la poudre montrait qu'il avait servi plusieurs fois. Puis, de façon plus brutale, avec la rapidité d'un chasseur sur sa proie, l'Homme au chapeau pointa son canon sur la nuque de l'archiviste.
Alexandra Koszelyk - L'Archiviste
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Roman - Noir

Ça baigne dans le béton

Huis-clos MAJ jeudi 27 janvier 2011

Note accordée au livre: 5 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 5,9 €

San-Antonio
François Boucq (illustrateur de couverture)
Paris : Fleuve noir, décembre 2010
286 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-265-08930-3
Coll. "San-Antonio", 135

En béton armé

"Il poussa la porte et entra." Les connaisseurs de Frédéric Dard connaissent cette phrase mythique dont le romancier expliquait qu'elle symbolisait selon lui ce que devait être un début de roman. "Il poussa la porte et entra." Pourquoi ouvre-t-il cette porte ? Que trouve-t-il derrière ? Deux questions qui offrent un infini de réponses, donc de situations romanesques. C'est dire l'importance d'une scène inaugurale dans un San-Antonio. Au fur et à mesure des titres, ces premiers chapitres prennent une dimension littéraire de plus en plus considérable, véritables petites nouvelles indépendantes enchâssées dans le roman. Le type qui consacrera une étude aux incipits chez San-A décrochera le pompon. Je dis ça, je dis rien...
Ça baigne dans le béton répond parfaitement à cette exigence. Et rien que pour l'ouverture, il faut absolument lire ce roman. Rarement la puissance évocatrice, la dimension visuelle de l'écriture dardienne ont été autant maîtrisées. Le tout dans un style féroce, hargneux, cynique, célinien, fellinien, grotesque, burlesque, bref, jouissif. On se croirait dans un carnaval moyenâgeux ou dans un portrait de Bosch.
De porte, il est également question dans l'intrigue. Mais ici qui se ferme. Un couple de vieux débris allumés requiert la protection de San-A pour assurer leur sécurité à la suite de menaces de mort. Chaque année, ces deux cintrés se remarient en une parodie de cérémonie dans une minuscule chapelle érigée en leur propriété. San-A accepte, convaincu de la sénilité de ses clients. La cérémonie commence, quand les portes de la chapelle se ferment brutalement sur quatre personnes. Le temps que les autres invités arrivent à ouvrir les portes, il est trop tard. Les quatre protagonistes gisent égorgés.
Non content de se faire plaisir avec des portraits et des gueules d'une rare méchanceté, Dard s'attaque à l'exercice imposé du crime en huis-clos. Disons-le tout net, il n'a visiblement aucune idée du dénouement au fur et à mesure qu'il enchaîne les coups de théâtre en page turner virtuose qu'il est. Peu importe, il retombe sur ses pattes avec une certaine souplesse.
Intrigue prenante, style acéré comme jamais, du cul (beaucoup...) et même, en filigrane, des bouffées de ce désespoir latent, de cette incapacité au bonheur (voir l'évolution entre le début et la fin du roman des relations entre San-A et Marika, sa future ex-promise.). Un San-A taillé dans le roc, de ceux qui passent à la postérité le front haut.

Citation

En le voyant, je me suis rappelé l'histoire de ce gynécologue qui avait fait fortune sur le tard parce qu'il avait contracté la maladie de Parkinson.

Rédacteur: Maxime Gillio jeudi 27 janvier 2011
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