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Inédit
Tout public
Traduit de l'espagnol (Mexique) par Isabelle Gugnon
Paris : Gallimard, mars 2011
264 p. ; 23 x 16 cm
ISBN 978-2-07-012580-7
Coll. "Série noire"
Corridos mortels sur fond d'amour
Balles d'argent, du Mexicain Élmer Mendoza, est un roman urbain mélange d'amour, de manœuvres politiciennes, de violence et de corruption, écrit dans un style affirmé à la rhétorique à la fois surprenante, chaotique et pourtant cohérente.
Tout le monde ou presque a entendu parler de la situation de Ciudad Juarez, dirigée de fait par des narcotrafiquants qui y font régner la terreur. Cette ville n'est qu'une excroissance des maux du Mexique, pays qui a eu le malheur d'être frontalier avec les États-Unis. Dans le monde d'Élmer Mendoza, les narcotrafiquants se trimballent en hummer noirs ou verts, jouent de la gâchette, ont la menace facile et la corruption évidente. Dans celui de son héros Edgar Mendieta qui, allez savoir pourquoi a les mêmes initiales que l'auteur, l'amour a une place prépondérante.
Lui est surnommé Zurdo - Le Gaucher -, mais il est avant tout fou ou entêté ou les deux. Car Balles d'argent, écrit en 2008, s'inscrit dans la plus pure lignée du roman noir tel qu'il a été inventé par les anglo-saxons nords-américains avant que d'être approprié par les sud-américains. À la jonction de ces deux "écoles" se trouvent donc Élmer Mendoza, Paco Ignacio Taibo II, Enrique Serna ou Martin Solares - ce dernier ayant la double-casquette d'auteur et éditeur, et qui d'ailleurs le publie au Mexique. Mendieta est un héros solitaire, profondément anéanti par une rupture amoureuse. Il est à la fois cynique et humain, touchant et énervant. L'intrigue du roman, très linéaire tient elle-même en une seule ligne : un avocat aux mœurs dissolus, fils d'un ministre futur candidat à la présidentielle, est retrouvé mort d'une balle en argent en pleine tête. La résolution de l'enquête ne semble intéresser qu'Edgar Mendieta. Plus il avance, plus on lui met de bâtons dans les jambes et plus les cadavres s'amoncellent à ses pieds. Tout cela est écrit avec un style où narration et dialogues se mélangent, et qui peut déboussoler le lecteur, Élmer Mendoza nous promène dans les rues et les bars, boit, mange, fait l'amour, discute, ennuie. Pendant ce temps, les gens se déchirent alors qu'ils écoutent l'émission radiophonique Veilleurs de nuit ou bien des corridos, ces chants louangeurs à la gloire des narcos. Mais l'homme est besogneux. Il veut découvrir la vérité même s'il doit pour cela défier sa hiérarchie. Il peut compter sur des personnages truculents, assez stupides et courageux pour l'accompagner. Et, à l'instar du Continental Op, cher à la Moisson rouge, de Dashiell Hammett, tous les moyens sont bons pour y arriver et résoudre une situation inextricable. Même les pires.
Poésie et violence s'unissent dans un roman captivant, mélodramatique à souhait. On aimerait qu'ils soit adapté par Bollywood pour mieux faire resurgir ce qui caractérise Élmer Mendoza de ses compatriotes. Comme disait Sophie Forte : "L'important, c'est d's'aimer !"
Citation
Ce flic, ce Mendieta qui réclamait à grands cris que les coupables soit punis, comment osait-il venir le déranger jusque chez lui ? Il ne suffisait donc plus de graisser la patte des hauts fonctionnaires pour être tranquille ?