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Inédit
Tout public
Alexandra Dima (lecteur)
Traduit du français par Max Stadler, Lucille Clauss
Paris : Audiolib, février 2011
ISBN 978-2-35641-277-5
Hiver, la douceur de la mort
L'odeur des pommes. Blancheur glacée. Elle, folle peut-être, dort. Qu'est-ce qu'il a fait ? Qu'est-ce qu'il a fait ? Elle cauchemarde : les êtres humains sont-ils faits les uns pour les autres ? On peut effacer le désir, éteindre le souffle, mais... Quelque chose s'est passé. Qui est-elle ?
Un prologue poignant, littéralement, nous jette dans l'angoisse d'un matin de janvier. Glacial. Le cadavre d'un homme, Bengt le Ballon, obèse, nu, le ventre lacéré, est pendu à un arbre. Un meurtre. Malin Fors, la trentaine, mère célibataire d'une ado de quatorze ans, enquête. Le froid assiège la ville. –20°. Qui peut aimer un tel froid ? Malin songe à sa fille endormie, lectrice frénétique de Jane Austen. Malin et son gros pull grossier, ses bottes en caoutchouc. Elle songe aussi à son mec, Yann, soldat des Nations unies. Volontaire pour tous les coups durs. La scène de crime se met lentement en place. Magnifiquement. Chacun prend le temps d'y être, le mort lui-même, qui flotte au-dessus de tout cela tandis que son sang finit de se figer. Il se met à penser, tout haut.
Les flics s'animent autour de lui. Les ténèbres l'envahissent. Lui trouve agréable de rester encore un peu là, immobile et nu. En marge. Il l'était de son vivant. Le protégé d'une jeune assistante sociale qui a déserté sa famille de marginaux passablement frustres – qui nous vaudra une plongée attentive aussi bien qu'effarante, dans le quart monde suédois.
Il y a ainsi une épaisseur de la narration qui n'est pas réductible à l'intrigue, comme il en va d'ordinaire avec ces romans par trop déférents aux lectures pressées, qui nous feraient volontiers prendre le pitch pour l'essentiel du texte. Et c'est une véritable homologie de structure que l'auteur met en place, où la lenteur de la narration répond à l'engourdissement qui menace, le corps bouffi en premier lieu, de ce monstrueux bébé pendu à cinq mètres du sol, jetant sur toute chose son regard de nouveau né dans la mort. Une voix qui contamine peu à peu toutes les voix, les force à intérioriser leur relation au monde, l'intimité pour seul vrai rapport au froid, à ce qui sépare, écho assourdi par la neige aussi bien, des dialogues antérieurs qui nous ont fait et de ce passé qu'il faut laisser remonter à la surface pour que la solution se révèle.
Un rythme très lent donc, celui de laisser se révéler l'intimité des choses, des êtres, de déchets en résidus, baignés dans l'atmosphère musicale parfaite cette fois encore des Audiolib, mystérieuse à souhait mais offusquée par une lecture qui tantôt vous jette le texte à la figure, tantôt vous le murmure comme une voix tout près de défaillir, celle de ce corps précisément, qui ne raconte plus mais voudrait dire encore sans y parvenir, dans ce dernier moment qui lui est offert.
NdR - 1 CD MP3 - 640 Mo, 11 h 35 d'écoute.
On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°44
Nominations :
Prix du meilleur polar des lecteurs de Points 2011
Citation
Avons-nous donc déjà vécu ou bien sommes-nous morts dans ce lieu si étroit qu'il ne peut faire de place à l'amour ?