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Félicie est là
Poche
Réédition
Tout public
158 p. ; 18 x 12 cm
ISBN 978-2-07-030753-1
Coll. "Policier", 626
Maigret et nos pantoufles
"Maigret ? Que voulez-vous que je vous dise ? Il s'installe dans une enquête comme dans des pantoufles..." En deux questions et une réponse, Georges Simenon s'offre le luxe d'une exacte description de son commissaire. Le reste n'est que fioriture. Dans Félicie est là, roman écrit en 1944, un retraité d'un petit village paisible est retrouvé assassiné à l'étage de sa maison. Félicie, sa jeune domestique, était partie faire des courses. Maigret comprend sur le champ qu'elle cache un pan de la vérité. Il va prendre alors le temps de la découvrir.
D'habitude, Georges Simenon propose une intrigue simple avec une solution encore plus simple comme si les crimes les plus sordides naissaient de l'ordinaire. Ce roman fait quelque peu figure d'exception avec un crime ordinaire qui puise ses racines non pas dans l'extraordinaire comme on pourrait l'imaginer fantastique mais dans l'extraordinaire en cela qu'il sort simplement de l'ordinaire. Sans dévoiler la fin de Félicie est là, il faut attendre les trente dernières pages pour que l'auteur nous fasse gré d'un événement que nous ne pouvions connaître. Mais la chose n'est pas grave. L'important pour nous, lecteurs, est d'être comme Maigret, installés dans son "enquête comme dans des pantoufles".
Alors, on prend en filature l'insaisissable Félicie, on s'attable à ses côtés dans un petit bar de la place Blanche, on la perd dans un magasin pour la retrouver dans le métro. On a le temps de l'observer, d'éplucher ses manies, ses gestes simples et sa pensée romanesque. Cette fille au physique ingrat qui se voit plus comme la fille du retraité assassiné que comme la domestique qu'elle est dans les faits. Mais on a sûrement bien moins de patience que Maigret, et heureusement qu'elle est entre ses mains. Pas de convocation au 36 avec une lumière dans les yeux. À mesure que Simenon déroule son intrigue, Maigret remonte une pelote de laine. Il laisse le soin à ses seconds de parcourir en tous sens la campagne sous la pluie. Il profite des petits moments n'hésitant pas à susciter l'envie comme lorsqu'il décide qu'il mangera des huitres. Et le moment venu il agit. Et la force de Simenon est justement d'avoir raconté une histoire toute simple à partir d'un fait divers sanglant sans que pour autant l'on ait eu envie de sortir de nos pantoufles. Vous avez dit "grand art ?"
Citation
Maigret ? Que voulez-vous que je vous dise ? Il s'installe dans une enquête comme dans des pantoufles...