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Inédit
Tout public
Traduit de l'espagnol par Denise Laroutis
Paris : Rivages, mai 2008
510 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-7436-1822-3
Coll. "Thriller"
Don Quichotte sauce Alfonso
Cervantès aurait glissé des attaques personnelles contre Lope de Vega dans sa première partie du Quichotte. Ce dernier, pour se venger, aurait écrit la seconde partie dans laquelle il met en avant un auteur sodomite et lâche. Pour Isidoro Montemayor, la tâche assignée par Don Francisco Robles, libraire et tenancier de tripot, s'annonce ardue. Il s'agit de découvrir qui se cache sous le pseudonyme d'Avellaneda, l'auteur de cette seconde partie. Voilà la trame initiale d'un très long roman espagnol primé dans son pays (510 pages et 107 chapitres, quand même !).
Au début, évidemment, on se dit que c'est un énième roman policier historique. Puis on se rend compte que ce qui attire et fait qu'on ne lâche pas ce bouquin, ce sont toutes ces petites choses de la vie quotidienne de Madrid dont témoigne Isidoro, gazetier à ses heures (pas) perdues. Car Isidoro court partout, des hémorroïdes au cul, le pantalon collant de sang et de miel tandis que la sueur dégouline de son visage sous le soleil rude des rues madrilènes. Avec lui, on écoute, on observe. Toutes ces rumeurs et ces faits divers qui se mélangent, s'épaississent. L'injustice d'une justice qui permet aux riches d'assouvir leurs envies. On tremble à l'idée que l'émasculation d'un nain soit l'enjeu d'une partie de cartes. On ne peut s'empêcher de pincer son nez quand on sent les remugles d'une ville dont les habitants jettent leur pisse et leur merde par les fenêtres quand ce n'est pas un dentiste qui conserve l'urine pour entretenir des dents blanches. Les luttes d'influence du pourtour de la Méditerranée jusqu'en Hollande (!) se jouent sous nos yeux.
On sourit jaune car quelques histoires de ce Madrid de l'Âge d'Or se déroulent encore aujourd'hui, faisant de ce roman, aussi, comme le Quichotte à son époque, une satire de notre société. Et Cervantès et son Quichotte dans tout ça ? On (re)lit autrement cette première partie au chevet d'un homme malade de payer son médecin (on ne devrait jamais payer un médecin, explique Don Francisco, car alors il s'attache), on y découvre ce qu'affabule ou pas Alfonso Mateo-Salgado dans un style où se mêlent farce, épopée et grand roman. Isidoro sur son âne en partance pour Tolède est une véritable caricature de Sancho Pança. El les moulins subsistent.
On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°44
Citation
Il ne fait pas bon être aux mains de la justice quand on n'a ni argent ni protecteurs.