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Cartouche italien
L'Ange du Mal, de Michele Placido (Romanzo Criminale) est un retour au cinéma de mauvais garçon des années 1970, retour amplifié par l'apport des codes actuels centrés sur une violence sonore et gestuelle omniprésente. En s'attaquant à Vallanzasca, le plus grand gangster italien, l'acteur Kim Rossi Stuart (qui a collaboré au scénario) s'éloigne de ses interprétations intimistes pour endosser un costume romanesque et brutal. L'association de ces deux bienfaiteurs donne un ensemble surprenant qui risque fort d'en déstabiliser certains.
Bande annonce de L'Ange du Mal
Le film retrace, sans pour autant être une enquête et donc coller à la réalité, la vie de Renato Vallanzasca, gangster typique des années 1970. Tout commence par une grande camaraderie avec ses petits méfaits et ses grandes aventures (libérer le tigre d'un zoo), qui débouche sur la petite truanderie en marge de la mafia dans un esprit de liberté et de vie à cent à l'heure, qui ne peut donc que finir tragiquement.
Vallanzasca ne s'offre aucune limite. La vie, il la prend par tous les bouts. Sexe, grand luxe, alcool sans pour autant sombrer dans la drogue. Vallanzasca est une grande gueule, une belle gueule aussi, qui a "plus de couilles que de cervelle". Il réfléchit, agit et réagit sans réfléchir. C'est un personnage impulsif et généreux. Mais s'il a choisi sa vie, il n'en a pas pour autant vraiment choisi ses associés qui pour la plupart sont ses anciens camarades d'un jeu qui en valait à l'époque la chandelle. Et dans un retournement biblique, il sera trahi non par la volonté d'un Judas mais parce que les Judas qui l'entourent sont encore plus faillibles que lui.
Kim Rossi Stuart sous les traits de Vallanzasca c'est un mélange de Belmondo (pour le bagout et l'action) et de Dewaere (pour l'exacerbation des sentiments). Cela lui donne un côté Cartouche des temps modernes. Un brigand romanesque qui apostrophe les clients d'une banque l'air de dire : "N'ayez pas peur, ce n'est que Vallanzasca !". Celui dont toutes les Italiennes tombent amoureuses au point de lui envoyer lettres parfumées, petites culottes et grandes photos lorsqu'il se retrouve emprisonné. Impulsif, toujours sur le fil du rasoir, l'homme retrouve étonnement toute sa quiétude lorsqu'il passe à l'action. Mais il ne peut en dire autant de ses amis qui l'assistent. Dans ce métier, le temps que tu n'as fait qu'appuyer sur la gâchette d'une arme pointée vers le ciel, tu peux toujours espérer. Mais les premiers morts tombent accidentellement. Pour son plus grand malheur, on l'accuse de crimes qu'il n'a pas commis et on l'exonère de braquages qu'il a fomentés.
Michele Placido avec L'Ange du Mal s'attarde donc sur un digne personnage mythologique, emblématique et ambigüe à la répartie cinglante et humoristique, pour qui la vie n'est qu'un jeu aux règles strictes. Le film, qui est un long flashback débute par le passage à tabac de Vallanzasca qui n'a pas supporté qu'un de ses geôliers lui "offre" un cafard en guise de viande dans sa gamelle de haricots. Et c'est ainsi que même si on l'oublie temporairement, Vallanzasca va revenir sur toute sa vie à mesure que les coups pleuvent sur lui.
Une vie pleine d'une douce mais terrible témérité. Pour un peu on le croirait gascon. Un film violent qui ne sombre cependant pas dans la vulgarité, avec une palette d'acteurs bons vivants et vite morts ou emprisonnés. En à peine moins de deux heures, Michele Placido aborde la truanderie, son code de l'honneur, la prison, son code de l'honneur, et un homme d'exception qui finira par trahir son code de l'honneur pour ne pas flinguer un carabinier de vingt ans. On peut ne pas apprécier cet hommage à un héros mythologique des temps modernes, il n'en reste pas moins que c'est du bel art.
L'Ange du Mal : réalisé par Michele Placido - 111 min. avec Kim Rossi Stuart, Filippo Timi, Moritz Bleibtreu, Valeria Solarino, Paz Vega, Francesco Scianna...
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Illustration intérieure
Kim Rossi Stuart (Vallanzasca). Lunettes noires et arme de la même couleur en pleine séance de tir. (D.R.)
Citation
Je ne peux pas nier que j'en ai fait de toutes les couleurs. J'ai même provoqué de vraies tragédies mais crois-moi, je suis pas méchant.