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Inédit
Tout public
Traduit de l'italien par Serge Quadruppani
Paris : Métailié, octobre 2011
176 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-86424-843-9
Coll. "Noir - Bibliothèque italienne"
Tragédie moderne
Autrefois, lorsqu'un auteur voulait explorer la noirceur de l'âme humaine, il choisissait la tragédie. Cette tragédie s'intéressait aux problèmes des puissants, et le plus souvent des rois. Aujourd'hui, les lieux de pouvoir se sont déplacés, et la royauté est surtout l'endroit des people. Le véritable poids est détenu par les puissances économiques. Aussi, il est logique que ce soit dans les milieux industriels que l'intrigue d'Intermittence, le nouveau roman d'Andrea Camilleri se pose.
Tout se joue entre les capitalistes "à l'ancienne", qui sont les barons d'industrie à la fois riches et paternalistes, qui essayent d'initier leurs héritiers à la finance et aux alliances, et les nouveaux dirigeants, les cadres qui sont plus préoccupés par les notions de rentabilité, de délocalisation, de pots de vin pour s'enrichir que par les véritables stratégies industrielles.
Intermittence déploie ce cadre pour montrer les plans diaboliques, la lutte à suspense qui s'installe entre la famille Manuelli et De Blasi. D'un côté le patriarche Manuelli, vieil homme que tous ont déjà enterré, et sa progéniture, Beppo, véritable fils à papa qui aimerait montrer son vrai visage. De l'autre, De Blasi qui a déjà créé un montage financier qui permettra au groupe de s'enrichir, aux actionnaires de gagner beaucoup d'argent et de s'en mettre personnellement plein les poches au passage.
Mais nous restons dans la tragédie. Dès le début du roman, De Blasi est menacé par une santé défaillante qui peut s'écrouler sans prévenir, créant une première intermittence, relancée par les célèbres intermittences du cœur car Andrea Camilleri joue avec le thème des amours contrariées, faussées, propres à la tragédie. En effet, personne n'aime la bonne personne et n'est aimé de celle qu'il souhaiterait. Dans le ballet moderne de la vie, c'est encore pire. Les sentiments n'existent plus, puisqu'ils sont une composante de la lutte pour le pouvoir : on couche pour améliorer son pouvoir, pour se venger d'un supérieur, pour humilier une épouse...
Intermittence s'ouvre sur une exergue rappelant que le travail ennoblit l'homme et s'achève sur une chute tragique (prévue depuis le début mais jamais nommée) comme une marque de l'ironie et de l'humour absurde qui gangrène notre civilisation en pleine déliquescence.
On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°44
Citation
Elle est tellement splendide, harmonieuse, lumineuse, qu'elle lui procure une émotion qui n'a plus rien à voir avec le désir. Voilà une sacrée nouveauté, mais Mauro espère bien qu'elle ne durera pas.