Contenu
Poche
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Violaine Huisman
Paris : Allia, septembre 2009
80 p. ; 14 x 10 cm
ISBN 978-2-84485-325-7
Quintessence de la non fiction
Les éditions Allia ont eu le bonheur de publier, dans leur tout petit format à 3 €, les trois enquêtes que David Grann réalisa pour le New Yorker, textes suffisamment longs pour en faire de courts livres passionnants. Après Trial by Fire déjà chroniqué sur k-libre, il convient de s'intéresser à Un crime parfait qui s'avère être une vertigineuse plongée dans l'univers de la fiction et de la non fiction puisque cette histoire est vraie.
En décembre 2000, le corps d'un inconnu est retrouvé dans l'Oder en Pologne. La police l'identifie comme étant Dariusz Janiszewski, trente-cinq ans, propriétaire d'une petite agence de publicité de Wroclaw. Le cadavre a un nœud coulant autour du cou et les mains liées dans le dos. Il semble avoir été torturé. Malgré des recherches approfondies, la police ne parvient pas à suivre de pistes valables et le dossier est enterré. En 2003, un inspecteur replonge dans le dossier et se rend compte que l'on n'a pas enquêté sur les coups de fil reçus dans l'agence, ni sur le portable de la victime. Or, la technologie des communications a fait d'énormes progrès en traçabilité et Jacek Wroblewki, l'inspecteur, va vite découvrir que les deux derniers rendez-vous à l'agence ont été passés d'une cabine téléphonique et que le portable de la victime s'est retrouvé sur un site de vente aux enchères. À partir du pseudonyme du vendeur (ChrisB), l'enquêteur va remonter à Krystian Bala, un universitaire philosophe qui a publié un livre intitulé Amok. Bala étant à l'étranger et la police comptant le cueillir quand il reviendra voir sa famille, force est de se concentrer sur le livre dont l'inspecteur fait des photocopies à toute son équipe. Le héros du livre se prénommant Chris et ayant réalisé un meurtre en partie avec un nœud coulant, la police se focalise sur cette fiction qui ne semble pas en être une mais un souvenir du romancier à peine déguisé. Parallèlement, le numéro de la carte prépayée ayant servi à téléphoner de la cabine est isolé. Rien de plus simple que de voir maintenant les autres numéros appelés...
Impossible de raconter toutes les péripéties de cette formidable enquête qui va précipiter un auteur au cœur de son ouvrage et lui ouvrir les abîmes de la mort. Comme à son habitude, l'auteur (David Grann) se met en retrait et n'apparaît dans le corps de l'ouvrage que par trois pronoms personnels qui perturbent le cadre de notre lecture avant de raconter classiquement son interview de l'autre auteur (Krystian Bala) en prison. Ce style américain des longs articles, touffu et aride à la fois, fait ici merveille pour déstabiliser le lecteur. Et quel prolongement d'intrigue de se précipiter sur Internet, lecture faite, pour dénicher les photos des protagonistes et les dernières nouvelles de l'affaire ! Avec les références littéraires et philosophiques que met en avant Bala et la création de son comité de soutien qui argue du fait qu'un livre ne reflète pas forcément l'expérience de l'auteur, nous tenons en main, un texte passionnant de non fiction que Roman Polanski devrait bientôt adapter.
Citation
Des comptes rendus du crime avaient paru sous des titres comme 'LA RÉALITÉ DÉPASSE LA FICTION' et 'MEURTRE, ÉCRIVIT-IL', un jeu de mot sur la série télévisée Arabesque, en anglais Murder, She Wrote.