Contenu
Grand format
Inédit
Tout public
322 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-914704-72-4
Coll. "Polar"
Marseille-Madrid-Marseille
Maurice Gouiran brasse de nombreux sujets dans Franco est mort jeudi, de la guerre d'Espagne aux problèmes économiques qui minent la cité phocéenne en passant par les très nombreux errements sentimentaux de son héros récurrent, Clovis. C'est ainsi qu'il nous convie à une intrigue qui nous plonge dans les méandres madrilènes, les non-dits d'une guerre civile et de la dictature qui s'ensuivit, et la mélancolie franquiste.
Tout débute naturellement à Marseille, ville de passion, ce qui n'est guère un secret. La langue est là, avec un phrasé qui hésite cependant à trouver certaines délimitations car, dans ce roman, la narration ne fait pas vraiment la distinction avec les dialogues ou les pensées des personnages. Il y a Manu qui vit de petits boulots au noir, et qui ne sont pas vraiment légaux. Il y a Patrice, son fils, surtout qui s'est mis en tête d'être à son compte au détriment d'une petite frappe locale, qui s'est empressée de lui demander avec insistance trente mille euros. C'est le déclencheur des ennuis, tout juste pondéré par l'apparition d'une lettre d'une cousine espagnole et inconnue de la famille. Cette histoire s'appuie sur trois générations, même si elle n'habitent pas sous un même toit. Élisa, mère de Manu, aujourd'hui décédée, avait fui à la fin de la guerre d'Espagne son pays natal pour les bords de la Méditerranée. Mais elle avait opté pour le silence qui va être brisé avec cette lettre.
C'est justement dans le récit de cette guerre d'Espagne que Maurice Gouiran nous offre quelques fulgurances romanesques et épiques. Il y a des conflits de pensée, des dissensions et déchirements familiaux, des biens que les franquistes s'approprient, des enfants enlevés à leurs parents, des familles déracinées quand elles ne sont pas emprisonnées voire exterminées, des histoires russes de l'époque de Staline avec le camp de Karaganda (sans compter des histoires russes contemporaines avec la mafia qui s'insinue un peu partout, mais là, on s'écarte de la période historique). Il nous invite à découvrir les conséquences actuelles dans le pays du poète fusillé Federico Garcia Lorca avec des nostalgiques en masse du Caudillo (le terme même de Caudillo est absent du roman alors que son nom intégral comme pour montrer l'emphase et l'ironie de la situation l'est à plusieurs reprises : Francisco Paulino Hermenegildo Teódulo Franco y Bahamonde), mais aussi en France, à Marseille, évidemment, avec les descendants de la retirada, ces Républicains espagnols qui ont franchi en 1939 les Pyrénées pour s'installer sur les bords de la Méditerranée.
Les petites histoires marseillaises n'apparaissent alors que comme une excuse en filigrane pour envoyer Clovis en terre madrilène. Il faut accepter ses élans sensuels et ses élancements sexuels. Les diverses enquêtes semblent au regard de toute l'Histoire déroulée bien minimalistes avec une conclusion bienveillante, mais entretemps Maurice Gouiran nous aura donné envie de visiter Madrid, de lire des poèmes de ces hommes meurtris, d'aller voir Guernica, ce tableau-témoin de Picasso des massacres hitlériens dans le village basque... Bref : de voyager et de nous cultiver, ce qui est une des vocations des romans !
Nominations :
Prix Polar Michel Lebrun 2011
Citation
Il ne termina pas sa phrase. Une des vertus du Glock est généralement de rendre muets les jacasseurs sur lesquels on les pointe.