Contenu
Romulus et Remus : les fils de Mars
Poche
Inédit
À partir de 10 ans
124 p. ; illustrations en noir & blanc ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-09-253914-9
Coll. "Histoires noires de la mythologie"
L’énigme du meurtre de Remus…
Une louve affamée se met en quête de son repas. Elle lève un lapin mais peine à l'attaquer : ses mamelles sont lourdes, aucun louveteau ne l'en soulage… Dans les broussailles, elle tombe en arrêt sur deux bébés humains. Des jumeaux qui ne demandent rien tant que de la soulager de son lait maternel. La louve les élève. Faustulus la découvre quelques jours plus tard, lui laisse les enfants avant qu'elle ne les lui remette. Habiles, les jumeaux excellent bientôt en tout, à la chasse tout particulièrement, maniant le glaive avec une dextérité peu commune. Faustulus découvre vite leurs origines royales, les cache comme il le peut, jusqu'à ce que l'écho de leurs exploits ne vienne enflammer l'imagination des habitants d'Albe. Le Roi Numinator lui-même en entend parler, les convoque, et découvre en eux ses propres petits-fils dont il croyait être débarrassé... Numinator, qui règne sur un royaume que lui dispute son frère, mourra bientôt, avant que Romulus ne se débarrasse lui-même de son frère.
Sombres histoires de familles, de trahisons, de luttes fratricides pour le pouvoir politique. Mais quant au fond, nul n'a jamais su pourquoi Romulus avait tué Remus. La légende est très floue sur cette question, labile même, et l'appareil critique contenu dans l'ouvrage, qui bien évidemment s'adresse aux collégiens, demeure sommaire.
Le thème de la gémellité y est peu traité, qui constitue pourtant le fondement le plus problématique de la légende et dont on ne sait toujours pas, aujourd'hui, qu'en faire, s'il ressortit à un motif archaïque ou s'il appartient en propre au canon du récit. Tite-Live par exemple tenta de s'en défaire en le mettant sur le compte d'un centurion téméraire, ou en invoquant la colère aveugle de Romulus, tout au regret ensuite du forfait accompli. C'est que ce meurtre gêne, alors qu'il s'agit de faire du mythe un récit fondateur. Ovide s'en démarqua bien davantage, aux yeux duquel il n'y eut jamais le moindre conflit entre les frères. Et l'un et l'autre contournèrent avec grands soins le problème de la gémellité, du double mimétique barbouillé de violence. Qu'est-ce qui, dans cette idée, embarrassait tant ? Qui y avait-il d'inavouable pour que les chroniqueurs romains aient à ce point songé à s'en débarrasser ? Quelle ambiguïté inspirait la présence de jumeaux dans le récit fondateur de la cité romaine ? Un présage de cataclysmes et de dérèglements sociaux ? Ou bien cette monstruosité de la nature souillait-elle leur conception de l'histoire des hommes par la répétition du même ?
Étrangement, on a pu remarquer que si les jumeaux abondaient dans les récits indo-européens et grecs, ce n'était pas le cas dans cette région latine du monde. Plus étrange encore, la gémellité de Romulus et Remus n'est jamais nommée dans le texte canonique ! Elle se déduit du récit de leur histoire, comme si à nommer la chose on risquait de s'approcher d'une réalité trop malsaine... Mais quand on se penche sur leur ascendance, on se rend compte que ce thème traverse toute leur généalogie. Nombre de couples fratricides ont présidé à leur apparition ! Des couples qui se sont opposés sans merci, avec furie, sauvagerie, dans une lutte effrénée pour la conquête du Pouvoir. Et quel pouvoir : le pouvoir politique ! La Couronne, dont la légende nous apprend pourtant qu'elle n'est rien sans l'argent qui lui confère sa vraie autorité... Mais toujours ce même désir de pouvoir lançant les uns contre les autres. Peut-être un imaginaire propre à l'Italie primitive, fondateur de son rapport au politique. Mais c'est toute une grammaire de l'usage gémellaire dans l'ancien univers mental de la péninsule qu'il faudrait écrire pour en comprendre le sens. Un sens qui à quelque chose à voir, aussi, avec le fait que les Romains ne sont pas originaires du pays où ils ont fondé leur cité. Remus et Romulus n'étaient pas romains. Rome est une ville sans origine...
Roi conquérant, fondateur violent, Romulus demeure ainsi une légende fort embarrassante à vrai dire, d'une identité qui ne peut trouver à se fonder que dans une volonté de conquête brutale...
Citation
La véritable puissance est celle de l'argent. Le pouvoir sans les biens est une coquille vide.