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Poétique de la ville
Un voyage. Qui débute au Moyen Âge. Une histoire : celle du corps entravé. Jadis physiquement, aujourd'hui mentalement. L'histoire de la contrainte sociale en somme, au fil des temps humains. Une contrainte dont un étranger tente de s'affranchir. En vain. Car la vie est un conte cruel. C'est du moins la perspective dans laquelle est écrit ce texte. Un étranger donc, posé a priori et dans l'abstraction d'une forme vague voyageant dans un décor vidé de toute substance. Il déambule. On songerait ici à quelque poétique de la ville. Mais il n'y a pas de ville : ne reste qu'un décor de carton pâte. Administré par quelque sectateur de Cioran. Dérive noire donc, nécessairement. Rues évidées, immeubles nus. Le récit est une pure abstraction. Il ne s'y passe rien, le personnel de l'œuvre est réduit à sa portion congrue. Seule la narration se dévide, poétique – pour le dire vite. Le personnage que l'on y croise est le produit d'une pensée abstraite. La ville est sans nom. L'étranger se refuse à nommer les choses, excluant de donner du souffle à un lieu que rien ne doit animer. Mais le ton est bilieux. Celui de qui veut avoir raison. Développant donc sa raison avec application : la construction d'un univers fictif abstrait. Un monde stigmatisé, nécessairement oppressant, où les hommes ne peuvent être que liges, abusés et abusant les uns des autres. Un monde de laboratoire pourrait-on dire, celui des idées, pour mieux en souligner le grotesque. Mais de grotesque, ce monde a priori et bien trop clinique, peine à se revêtir. Et le carcan, au final, pourrait bien être cette narration, qui emprisonne avec tant de soins ses idées. Concepts taillés à la mesure d'une démonstration acquise d'emblée. Dès la préface, invraisemblable, dévorant par avance tout le texte à venir, dirimante quant aux idées, dirimante quant au texte qu'elle introduit... Un éventaire plus que l'inventaire des contraintes sociales qui ont tué l'humain. Un éventaire qui l'ensevelit cet humain, dans une écriture célébrant volontiers sa propre tangente apocalyptique. Un récit qui se serait fait chaire, dans l'oubli de la chair du récit...
Citation
Une meute de chiens ébouriffés vient à sa rencontre, derniers vestiges d'une relation encore possible.