Contenu
Poche
Réédition
Tout public
Traduit du suédois par Magdalena Jarvin
Paris : Points, mars 2009
348 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7578-1304-1
Coll. "Policier", 2119
Quand tout s'estompe
Voilà un roman qui atteint la quintessence du thriller psychologique. Même si trois morts horribles sont évoquées dans le texte, aucune ne sera présentée en gros plan, ni même l'once d'une enquête. Deux des victimes seront enterrées et se comporteront comme des cadavres dans le placard. Tout dans Ténébreuses porte avec force sur le refoulé, le retour du passé que l'on croyait enfoui et qui cachait bien des vilenies. Parfois les fautes des pères rejaillissent sur les enfants. Ici, c'est le cas aussi, mais en plus, les enfants reprennent les mêmes erreurs et les perpétuent. Écrites de manière extrêmement subtile, deux paraboles sur la responsabilité offrent un écho à l'intrigue principale et l'éclairent dans un récit en demi-teintes, à l'image des secrets bourgeois que l'on cache.
Au départ, le père, écrivain, a trompé sa femme. Sa maitresse d'une nuit lui a laissé, outre les prémices d'un scandale, un manuscrit émouvant. Le scandale s'est étouffé avec la disparition de la jeune femme. L'écrivain a même obtenu le prix Nobel et est en train de mourir, l'âme en paix, ne pouvant plus communiquer. Son fils vit sur la gloire du père, dirigeant la fondation qui honore l'œuvre paternelle. Il est plus volage que son père, profitant de ses déplacements pour des conférences pour multiplier les amours de passage. C'est la mort de la gouvernante de la maison et le besoin de l'assistante sociale chargée de régler les papiers après la mort qui provoquent l'action : l'héritage, même limité, met en branle un jeune homme rebelle (fils de la maitresse disparue), un ancien ami du père écrivain lui-même, et la famille de l'écrivain mort. Chacun de ces personnages est mu par des pulsions contradictoires de celles des autres, et c'est de ces tensions que va naitre toute l'histoire.
Le talent stylistique de Karin Alvtegen éclate dans cette description simenonienne de la bourgeoisie, des petits intellectuels, des rancœurs mesquines, des désirs inaboutis. Enserré dans la mort sur son lit d'hôpital de l'écrivain, relancé par la mort solitaire d'une vieille femme, Ténébreuses restitue avec évocation des odeurs de moisi, de replis sombres, de cette impalpable sensation de quotidien morne.
Récompenses :
Prix des lecteurs/lectrices de critiqueslibres.com - policier-thriller 2011
Citation
La seule chose qui pourrait foirer maintenant serait que Paris Hilton achète un chat, ce qui ôterait mon livre des affiches, mais je vais espérer que tout se passe bien.