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Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Christophe Mercier
Paris : Gallimard, octobre 2012
344 p. ; 26 x 16 cm
ISBN 978-2-07-013781-7
Coll. "Série noire"
Vannes pour veines
À côté de son "travail" de mise en avant du roman noir, la "Série noire" a toujours eu à cœur de glisser dans son programme de publication, des textes atypiques, un peu déjantés, à l'humour grinçant ou ludique. En voici un nouvel exemple avec Nick Monday, un détective privé un peu particulier car aussi chasseur de chance ! De fait dans ce monde, la chance n'est pas une donnée abstraite mais une sorte de liquide qui coule en vos veines. Certains peuvent vous la subtiliser en vous serrant le poignet. Ensuite, ils la transforment pour la revendre... Et le roman de nous offrir des détails assez glauques sur les moyens justement de synthétiser cette chance.
L'intrigue, elle, se concentre sur une journée. Monday la commence bien, mais elle va déraper quand un mafieux chinois décide de l'engager pour rafler toute la chance de la ville. Le FBI veut qu'il utilise ses pouvoirs pour débusquer de la malchance et la refiler au même mafieux (juste retour des choses proposé par un Bureau fédéral que nul autre pays n'envie), et dans le même temps sans qu'il sache pourquoi, il doit lutter contre des gens qui en veulent à sa peau. La folle journée, qui va en Charybde en Scylla, est décrite avec énergie et humour, et l'on ne peut que suivre les aventures de Monday, esquissées avec rapidité et dans un style alerte. Chaque pas qu'il fait pour se sortir d'une situation ne fait que compliquer les choses. S. G. Browne ne manque pas non plus de s'inscrire parfaitement dans la lignée des classiques du privé cynique, ayant un regard acerbe et amusé sur les choses qu'il côtoie.
L'aspect fantastique lié à la chance doit être un peu plus nuancé car annoncé comme quelque chose de logique et expliqué dans ses moindres détails. La chance apparaît alors comme une forme particulière de drogue, avec ses accès d'euphorie, ses pertes de conscience, son marché parallèle, le tout donnant lieu à de belles évocations - un marchand de malchance dans sa boutique obscure, la sœur du héros qui essaye de vivre normalement. Porté donc par le dynamisme de l'intrigue, le style énergique de l'auteur, Heureux veinard est comme un combat de boxe. Le vainqueur finit aux points, étourdissant l'adversaire, virevoltant jusqu'au tournis. Une bien belle promesse pour un premier roman.
Citation
J'observe autour de moi les gens accoudés au bar ou assis aux tables dans les box, qui boivent leurs bières en ayant des conversations normales à propos de vies normales. Je parie que ce soir certains d'entre eux vont même baiser.