Comme dans un miroir

La jeune femme n'avait plus aucun repère, ne savait plus où elle était, ni même l'heure qu'il pouvait être. Le temps s'étirait à l'infini et, avec la peur qui la tenaillait, l'éternité ne lui était plus étrangère. Elle était une compagne vicieuse et encombrante.
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mardi 03 décembre

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Roman - Policier

Comme dans un miroir

Disparition - Immigration clandestine - Trafic MAJ lundi 26 novembre 2012

Note accordée au livre: 3 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 23 €

Gunnar Staalesen
Som i et speil - 2002
Traduit du norvégien par Alex Fouillet
Montfort-en-Chalosse : Gaïa, septembre 2012
300 p. ; 24 x 15 cm
ISBN 978-2-84720-259-5
Coll. "Polar"

Vieux saxo et sales magouilles

Les détectives privés sont habitués à travailler en toute discrétion pour mener à bien leurs enquêtes afin de ne pas se faire repérer par les personnes à suivre mais aussi par la police. Grâce à son métier d'avocate, Berit connait bien les méthodes de travail des privés. Elle demande à Varg Veum de rechercher sa sœur, Bodil, et son mari qui n'ont pas donné signe de vie depuis quelques temps déjà. Elle est très inquiète de cette double disparition mais elle souhaite absolument qu'il opère en toute discrétion sans trop s'expliquer sur cet excès de prudence. Il pourrait pourtant y avoir urgence à retrouver le couple qui s'est évaporé dans les airs.

Varg Veum va comprendre que sur cette histoire pourrait souffler un air du passé, la triste mélodie d'une sombre tragédie vécue par Berit et Bodil lorsqu'elles étaient toutes deux enfants. Leur mère est morte en compagnie de son amant, un saxophoniste. Ils ont été retrouvés noyés, enfermés tous les deux dans une voiture.
La police n'a jamais réussi à prouver si c'était l'acte désespéré d'un couple adultérin ou s'ils avaient été lâchement assassinés. Cela s'est déroulé durant l'année 1957, plus de trente ans séparent les affaires mais il reste à déterminer si le triste épilogue des amants à jamais réunis a pu se rejouer de nos jours, comme une vieille mélodie du passé qui ressurgirait à nouveau.
Varg Veum doit déterminer si l'inquiétude légitime de Berit est fondée ou si cette nouvelle disparition a malheureusement réveillé un point sensible et mal cicatrisé chez elle. Même si les deux affaires ont un air de ressemblance, il se demande ce qui aurait pu pousser les deux époux à mettre fin volontairement à leur vie.

Mais le lien est peut-être ailleurs. En cherchant à comprendre la vie du couple, il s'aperçoit que l'homme a quitté son travail depuis quelques temps. La société pour laquelle il travaillait n'est pas inconnue aux oreilles de Veum. Très récemment il en a entendu parler, cela concernait un bateau de la flotte marchande bloqué lors d'un voyage de retour. L'attitude des salariés est quelque peu étrange également. Ils ne semblent pas coopératifs et ne portent pas leur ancien collègue dans leur cœur, mais sans donner vraiment de réponses aux questions de Veum. Il va trouver leur attitude un peu étrange et se dit que cette piste mérite d'être creusée.
Décidément, cette affaire ne cesse de faire apparaître des coïncidences étranges, de faire des aller-retours entre passé et présent. Elle ne semble pas aussi évidente qu'à prime abord.
Et pour finir de mettre le doute dans l'esprit de Veum, il y a l'attitude assez énigmatique de Berit qui ne tient pas du tout à ce que l'affaire prenne une tournure officielle avec l'intervention de la police. Elle semble volontairement vouloir cacher quelque chose.

Gunnar Staalesen signe avec Comme dans un miroir un polar au rythme assez lent, principalement dans la première partie du livre. Il prend soigneusement le temps de mettre en place son histoire mêlant passion amoureuse, trafics et musique de jazz. La pureté des sentiments vient se confronter au linge sale des magouilles financières. C'est un roman qui s'ouvre en demi-teinte entre passé et présent où les opposés et le mensonge s'affrontent dans l'atmosphère glaciale de la Norvège. Mais Staalesen va finir par réchauffer l'ambiance en sortant un bon échantillonnage de la noirceur humaine. On peut définitivement oublier les bons sentiments du départ. Veum va finir par croiser des êtres qui n'ont qu'une envie, celle de faire un maximum de profit sur le dos des autres. Ils ne se sont pas hantés par une trop grande morale et ne semblent pas non plus gênés d'abuser d'autres êtres humains. Les déchets toxiques ont vite fait d'anéantir les nobles sentiments d'amour surtout si en plus se dissimule un réseau clandestin. Staalesen pointe précisément les travers d'une société moderne trop avide de gains faciles, mais peine quelque peu à nous faire rentrer dans son histoire. Il cherche peut-être trop à nous balader sur de nombreuses pistes en les embrouillant à dessein ou à tort. Heureusement cela se décante à la fin avec des révélations surprenantes. Il reste également le détective privé, Varg Veum, son héros récurrent. C'est le vrai plus du livre. Staalesen, au fil de ses histoires, a construit un personnage attachant aux multiples travers dont il a su parfaitement cerner le profil en jouant sur ses fêlures pour en faire un véritable atout littéraire. Il semble quelque peu hors du temps, un brin désuet face à cette société norvégienne des années 1990 en pleine mutation technique et sociologique. Mais c'est sans doute-là tout son son charme.

Citation

Au moment de quitter le commiseriat, une seule chose m'intriguait : pourquoi chaque fois que quelqu'un était persuadé qu'il y avait une explication naturelle à toute cette histoire, j'avançais un peu plus dans la conviction que ce n'était pas le cas ?

Rédacteur: Fabien Maurice lundi 12 novembre 2012
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