Contenu
Poche
Réédition
Tout public
250 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-07-030803-3
Coll. "Policier", 670
L'assassin de masse qui est en nous
Nous sommes en 1939 quand Georges Simenon écrit Chez Krull, un roman noir qui sous couvert d'une pseudo-enquête policière s'attaque à la dénonciation du refus de la population de l'intégration d'une famille allemande et qui doit faire face au ressenti nationaliste. Pour ce faire, l'auteur belge plante son décor le long d'un canal aux abords d'une écluse. Les Krull y tiennent une épicerie-café. Les mariniers viennent le soir y boire un coup. Leurs femmes y faire leurs courses non sans laisser une petite ardoise tenue scrupuleusement par tante Maria qui bien souvent l'éponge. Les Krull sont d'origine allemande et, en cette période trouble, un rien peut tenir lieu d'étincelle qui met le feu aux poudres. Et ce rien sera Hans Krull, cousin pas germain mais allemand qui débarque avec sa bonhommie, ses mensonges, ses escroqueries mesquines et surtout ses mauvaises manières. Non content de faire éclater le cocon familial qui survit grâce à une routine générationnelle, il jette le discrédit sur les Krull juste pour s'amuser, a-t-on l'impression. Dans cette histoire, s'il y a le meurtre d'une jeune fille et une enquête, si l'un des protagonistes est sexuellement fragile, il y a surtout des flics pour jouer les plantons inefficaces à la devanture d'un magasin face à une foule colérique stimulée par une ivrognesse menteuse. Georges Simenon à son habitude étudie l'humain, va chercher ce qui conduit la masse à devenir hostile puis furieuse, à refouler au fond d'elle-même le moindre degré de sympathie qu'elle ressentait pourtant quelques temps auparavant. Et Simenon de se lancer dans une étude de mœurs et de dépeindre des personnages communs mais exceptionnels avec leurs travers sur lesquels il pose une loupe. Chez Krull devient alors le témoignage écrit d'un fait divers avec des personnages à la Molière qui gravitent autour d'une maison en forme de huis-clos. L'atmosphère est oppressante comme dans un roman de François Mauriac, et la terreur nait de l'assassin de masse qui est en nous. En cela, Georges Simenon est un parfait révélétaeur...
Citation
Ce qu'il y avait malgré tout d'encourageant, c'était l'attitude de sa tante qui restait calme, un peu dolente. Ce n'était pas l'attitude d'une femme qui vient d'apprendre qu'elle abrite un escroc et que celui-ci, par-dessus le marché, a vilainement abusé de sa fille.