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On aime et on meurt comme ça
Poche
Réédition
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Maj Elfvik, revu et complété par Marc Boulet
Paris : Rivages, janvier 2013
224 p. ; 17 x 11 cm
ISBN 978-2-7436-2450-7
Coll. "Noir", 898
Poudre aux yeux d'escampette
En 1967, Donald Westlake entame une nouvelle série policière avec le personnage de Mitch Tobin, flic viré de la police parce qu'il était chez sa maîtresse au lieu d'épauler son coéquipier pour une arrestation sans problème. Sauf que ce coéquipier est mort pendant l'opération, et que la hiérarchie a bien dû tirer les conséquences de cette frasque morbide. Soutenu par sa femme - qui est décidément de bonne composition - Mitch Tobin en un acte expiatoire de première creuse on ne sait quoi si ce n'est que ce n'est pas sa tombe dans son jardin afin de monter un mur, et qu'il n'entend pas de sitôt quitter son état dépressif. Seulement, il y a ce mafieux, Ernie Rembeck, qui lui demande de retrouver sa maîtresse enfuie avec quatre-vingt mille dollars. Mitch Tobin était malgré tout un bon flic, il sera un bon détective.
Passons sur ses hésitations qui trouveront solution dans la culpabilité qu'il ressent envers sa femme. Mitch Tobin enquête selon son modus operandi, sans tergiversations et sans compromis. Il entend bien obtenir ce qu'il demande, et comme il ne demande pas l'impossible, il l'obtient. L'enquête démarre sur les chapeaux de roue et avec rigueur. Trop peut-être car à partir d'une liste exhaustive de suspects qui conduit à des interrogatoires à la chaîne, quelqu'un décide de faire sauter le bureau dont il vient tout juste de prendre possession. Ce pourrait être une tentative d'intimidation, sauf qu'il y a un mort. Un autre. Alors Mitch Tobin passe la sur-multipliée en même temps qu'il mène sa barque et les autres en bateau. Les autres c'est avant tout la police, ses anciens collègues qui le méprisent tous. Et Mitch Tobin, bien entendu, va découvrir ce qui s'est réellement passé selon l'adage repris quarante ans plus tard par le Dr. House : "Tout le monde ment." Car sous couvert d'une fuite avec magot, il va découvrir des mobiles parallèles et discordants qui pourtant concordent en un acte : la mort de la maîtresse dès les premières pages du roman.
On aime et on meurt comme ça, qui a été publié par les éditions Gallimard sous le titre Chauffé à blanc avec pour nom de plume celui d'un de ses pseudonymes, Tucker Coe, est un excellent roman qui inaugure une très bonne série bien différente des deux pour lesquelles on connait Donald Westlake. Loin du froid et meurtrier Parker, et du déprimant et pourtant jouissif Dortmunder, Mitch Tobin permet à son auteur d'arpenter le pan du hard boiled avec un détective marqué par la vie qui secoue les vestiges d'une société malade et mensongère. Même s'il s'agit ici d'explorer l'aristocratie du crime, il est intéressant de noter que les réactions humaines sont exactement les mêmes que dans la "bonne société". Le roman se pare d'une intrigue que n'aurait pas renié Raymond Chandler avec une écriture moins lyrique et plus factuelle, qui va à l'essentiel, à la limite de l'automatisme mais qui reste juste. Sous une apparence complexe, se découvre une réalité simple. Et c'est bien le rôle d'un auteur de romans noirs que d'arriver à démêler une fuite qui n'en était pas vraiment une avec des tenants et des aboutissants que seuls le détective peut - en notre âme et conscience - découvrir.
Citation
Qu'est-ce que vous espérez en embauchant un flic... un ancien flic ? Qu'il lui suffira d'aller s'asseoir dans un coin, de réfléchir un moment, et qu'il vous balancera le nom de l'assassin ?