Contenu
Poche
Réédition
Tout public
342 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7578-1190-0
Coll. "Thriller", 2944
Mort à l'étouffée
Cobra fait suite à Vox. On aurait pu penser que commençait-là une nouvelle série mais, plus de dix ans après se première parution, aucun troisième volet n'est sorti. Étrange ? Finalement non. Non que la qualité ne soit pas là mais la texture même de l'intrigue, et surtout le développement des personnages pouvaient impliquer pour Dominique Sylvain la difficulté à poursuivre plus qu'un diptyque.
L'équipe policière se concentre autour du commissaire Alexandre Bruce et de l'inspectrice Martine Lewine, amants d'un soir mais dont les trajectoires semblent s'éloigner irrémédiablement. Le seul élément stable, c'est Victor Scheffer, le troisième membre de l'équipe. Normal me direz-vous car blessé par balle à la fin de Vox, il est plongé dans le coma, mais le commissaire Bruce le tient régulièrement au courant de l'enquête. Des scènes maîtrisées stylistiquement nous mettent d'ailleurs dans la tête de ce blessé qui, peu à peu, revient dans le monde des vivants.
Face à cette fière équipe, une brochette de suspects tous aussi malmenés par la vie : un handicapé mental revenu du coma, des industriels de la pharmacie qui ne pensent qu'aux bénéfices ou à tester non pas un médicament mais une drogue ultime, des relations amoureuses et sexuelles complexes.
De nouveau que pour Vox, le point de départ pourrait être celui d'un tueur en série. En effet, un homme est retrouvé mort empoisonné, dans d'atroces souffrances. Une signature est là : le Cobra. Mais à mesure que d'autres victimes apparaissent, le doute s'installe. Car le roman policier offre un pendant au tueur en série, celui de la vengeance mûrement orchestrée.
De fait, entre les méandres psychologiques, les failles béantes des personnages qui, tous, semblent programmer leur propre déchéance, dans une version pulsionnelle de suicide par personnes interposées, le désespoir né du gouffre entre ce que l'on veut vraiment être et l'image que l'on doit donner dans la société, Cobra est un thriller qui montre une société malade, où le meurtre n'est qu'un moyen d'expression parmi d'autres, une manière rationnelle et rapide de résoudre les conflits. On se sert de son intelligence, de son corps, de sa névrose, et de son pouvoir social pour rester en haut du panier de crabes et survivre un peu plus longtemps. Même les policiers qui pourraient avoir une relation humaine proche de la normale n'y arrivent pas, ce qui permet même à Dominique Sylvain de créer quelques scènes de vaudeville, comme lorsque Bruce ramène sa coéquipière chez lui pour y découvrir sa maîtresse l'attendant langoureusement.
Au vu de cette plongée anxiogène et sombre, où le lecteur, malgré un final qui résout les choses, sent de plus en plus l'impossibilité de respirer, l'on ne peut que comprendre qu'il n'y ait pas encore de troisième volume paru, et que Dominique Sylvain se soit dirigé vers d'autres rivages qu'elle parcourt avec bonheur.
Citation
Mon coma n'est qu'une longue attente. La haine est mon venin. Je peux l'inoculer ou le cracher et vous brûler les yeux.