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Inédit
Tout public
Paris : Casterman, avril 2013
104 p. ; illustrations en couleur ; 29 x 22 cm
ISBN 978-2-203-05931-3
Actualités
- 16/06 Nécrologie: Décès de Jean Vautrin
Selon le blog de l'association 813 - Les Amis des littératures policières, qui se fait l'écho d'un message de Claude Mesplède, le romancier Jean Vautrin est mort. Jean Vautrin, de son vrai nom Jean Herman, prix Goncourt en 1989 pour Un grand pas vers le Bon Dieu, était à la fois un brillant conteur d'histoires et un merveilleux styliste. Amateur de la grande histoire, celle qui s'écrit avec un grand H, il avait bâti une œuvre impressionnante dont Le Cri du peuple, adapté par Jacques Tardi en bande dessinée, est une pierre angulaire graphique qui relate la commune de Paris. Emmanuel Moynot avec L'Homme qui assassinait sa vie, Baru avec Canicule ou encore Eugénie Lavenant avec Le Pogo aux yeux rouges avaient donné ampleur et relief à ses intrigues noires classieuses. Les amateurs de romans policiers se rappeleront Billy-Ze-Kick (1974), Typhon gazoline (1977) et donc Canicule (1982), adapté au cinéma par Yves Boisset. C'est d'ailleurs au cinéma que Jean Vautrin avait débuté sa carrière étant tour à tour assistant réalisateur, réalisateur et scénariste (de renom). Il aura collaboré avec Georges Lautner, Claude Miller, Yves Boisset et Gilles Béhat. Jean Vautrin est décédé à l'âge de quatre-vingt-deux ans ce mardi 16 juin dans sa maison de Gradignan. Adieu l'ami.
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Rouler sa Beauce
Aniello observe planqué dans un champ de blé Bogart enterrer une pleine valise de billets avant de croiser la route d'Al Capone filochant Bogart à bord d'une décapotable blanche. Nous sommes en pleine Beauce sous une chaleur caniculaire et tous ces personnages ne sont pas des mirages mais des surnoms distribués allègrement par Chim, jeune adolescent battu par son beau-père dans une ferme où tous sont d'étranges personnes.
Ceux qui ont lu le roman de Jean Vautrin savent qu'il a écrit un texte dense et touffu avec de longs monologues introspectifs dans un langage fleuri, et des dialogues savoureux et inventifs. La grande force de Baru, c'est d'offrir une bande dessinée graphique où le texte tend vers l'épure, le dessin s'accaparant le fleuri, le savoureux et l'inventif. Les deux hommes ont leur propres univers, et dans ce Canicule, ils s'autoalimentent avec un certain plaisir. Les planches sont à la fois claires, chaleureuses et étouffantes. Étrangement, il y a du Hugo Pratt dans certains profils, surtout lorsque les traits de personnages meurtris par leurs proches se tendent.
L'histoire, elle, est à la fois concise et loufoque. "Bogart", c'est Jimmy Cobb, un Américain en fuite après un braquage suivi de l'élimination de ses acolytes. Une enflure de la pire espèce qui va se faire enfler par un gamin. Dans la ferme, la brochette est savoureuse entre Horace, tyran lui aussi de la pire espèce qui file des baffes à tout va, Jessica sa femme meurtrie et haineuse, Socrate, son frère ivrogne qui tient une petite station service à l'écart d'une route de campagne, Ségolène la moche nymphomane qui va jusqu'à offrir son corps aux porcs, et enfin Gusta, la vieille édentée plus proche que jamais du gouffre morbide. Bien sûr, Cobb aux aguets, poursuivi par des flics qui hantent le ciel en hélicoptère, finit par se cacher dans une grange. Une cachette qui n'en est pas une : tous les habitants de la ferme - sauf Gusta qui ne demande rien à personne et qui se pendre en un geste désespérée - vont finir par lui rendre visite avec des intentions différentes. Ségolène veut se le faire même par derrière, Jessica veut qu'il flingue Horace, Horace et Socrate veulent qu'il leur refourgue son magot. Mais, dans l'intervalle, Chim s'est fait la malle avec le magot au guidon d'une motocyclette. Seulement voilà : il croise le chemin d'un survivant du casse, et le monde des adultes prend le pas sur celui des enfants dans l'univers qui est propre à Jean Vautrin. Alors les balles crépitent, le sang gicle, étonnamment le foutre ne suit pas. Tout ça pour rien du tout ou si peu : l'immoralité prendra le dessus dans un final hallucinant dans lequel Chim gomme tout le monde. Tout simplement brillant !
Illustration intérieure
Citation
Ici, vous ne vous en tirerez pas tout seul, monsieur Cobb... Ici, personne ne raisonne comme vous en avez l'habitude... Vous serez obligé d'en passer par quelqu'un, sinon vous êtes un homme mort sur pied.