Contenu
James Bond par Roger Moore : 50 ans d'aventures au cinéma
Grand format
Inédit
Tout public
Bond on Bond - 2012
Avec la collaboration de Gareth Owen
Traduit de l'anglais par Christophe Rosson
Paris : Gründ, octobre 2012
224 p. ; illustrations en couleur ; 29 x 22 cm
ISBN 978-2-324-00302-8
Lire et laisser mourir
James Bond, le personnage créé par Ian Fleming a cinquante années de cinéma derrière lui, et a vu quelques acteurs de prestige l'incarner à commencer par Sean Connery. Aussi, n'est-ce pas surprenant de voir poindre quelques coups éditoriaux. Le moindre d'entre eux n'est sûrement pas ce James Bond par Roger Moore, sobrement sous-titré "50 ans d'aventures au cinéma", dont la lecture s'avère à la mesure du texte écrit par Gareth Owen : décousue. D'ailleurs, l'acteur anglais nous prévient dès les premières pages : il ne connait de l'aventure James Bond que la sienne, ne savait rien des romans de Ian Fleming avant qu'on lui propose le rôle et, hormis pour le quarantième anniversaire du personnage hollywoodien - il y a dix ans donc -, il ne s'y est intéressé que de très loin.
Il eut donc été hautement plus intéressant de raconter son James Bond. Cela aurait évité les imprécisions et cette impression de superficialité. Nonobstant ce grief, l'on découvre un Roger Moore sur les plateaux qui commet blague de potache sur blague de potache, obnubilé (malgré ses dénégations) par l'argent (il quitte l'Angleterre lorsque le fisc veut l'imposer à 87 % ; il tente de conserver un costume qui lui plait bien après une scène tournée ; il regrette de ne pas avoir gardé de documents de production qu'il aurait pu aujourd'hui revendre à prix d'or sur eBay ; et surtout il n'arrête pas de dire qu'il faut bien gagner sa vie...), qui sombre souvent dans le machisme le plus graveleux (ah... ces légendes sous les photos de James Bond Girls), et qui est d'une modestie hors-pair (il avoue quand même du bout des lèvres que Sean Connery est le meilleur interprète de l'agent 007 mais seulement car il a campé le premier le personnage et lui a donc donné corps). Le tout écrit de façon totalement déstabilisante en utilisant le jargon que l'on réserve aux biographies de stars pour teenagers énamourés.
Pourtant, à commencer par les nombreuses illustrations qui parsèment et aèrent ces deux cent vingt pages, il y a de nombreuses anecdotes intéressantes qui touchent exclusivement aux films qu'il a tournés entre 1973 (Vivre et laisser mourir) et 1985 (Dangereusement vôtre) avec quelques petites révélations (mais pas trop) pour les fans de la première heure. Ainsi quand pour tourner une scène de Dangereusement vôtre depuis la tour Eiffel, nous fait-il partager ses souvenirs de l'administration française que nous aimons tant : "Autre cascade, le saut en parachute depuis la tour Eiffel. B. J. Worth devait la réaliser. Les autorités nous avaient donné leur aval pour le saut, mais... l'atterrissage sur un bateau voguant sur la Seine dépendait d'une autre autorité. Celle-ci commence par refuser l'autorisation de filmer. Nous pouvions donc sauter mais pas atterrir. Au final, un terrain d'entente et d'atterrissage - a pu être trouvé." Il ajoute quelques illustrations de vignettes caricaturistes de journaux anglais se gaussant qu'il endosse encore à cinquante-huit ans le costume de l'agent au permis de tuer, démontrant, et c'est chose rare dans ce beau livre, un certain sens critique.
Le simple amateur se délectera de ces moments, les seuls dont la lecture est agréable et captivante, même si l'on est surpris de se retrouver dans un monde sans requin (ah ! Ah !) puisque Roger Moore adore tout le monde, ne pense que du bien de Timothy Dalton et de Pierce Brosnan, et qu'à le comprendre on est prêt à penser que c'est à lui qu'est incombé la décision de choisir Daniel Craig envers et contre tous. Au fil des pages, on a l'impression de lire l'hagiographie de ceux qui ont fait vivre JB007 et qui sont morts. L'on se demande si à la réflexion, devant le nombre de fois où l'acteur s'est retrouvé au cimetière pour rendre un dernier hommage à ses nombreux amis disparus, il n'est pas sorti déprimé de l'écriture de ces souvenirs. Mais son passage parisien, et sa signature dans une librairie des Champs-Élysées a pu lui redonner du baume au cœur : la file des badauds livre en mains qui attendaient l'autographe "Bond... James Bond" lui a sûrement permis de s'offrir une nouvelle paire de chaussures Ferragamo...
Citation
Il semblerait que ces eaux grouillent d'une foultitude de maladies. Hélas, après un virage un peu trop serré à bord de ma barge, j'ai été déséquilibré et jeté par-dessus bord. Je suis resté lèvres closes sous l'eau afin de ne pas me faire charcuter par l'hélice de ma barge... mais j'ai commis l'erreur d'ouvrir les yeux. J'étais tombé à l'eau près d'une enseigne de pompes funèbres... vous imaginez le spectacle sous-marin.