Cauchemar dans la rue

Rien ne laisse deviner toute cette détresse depuis l'extérieur de ce camp qui longe une route rarement empruntée. Une départementale qu'on évite à moins que le GPS nous y oblige et un décor qu'on prend soin de ne pas voir quand on le croise parce que c'est désagréable de se figurer ce qu'il y a derrière. De toute façon, ça dépasse l'imagination.
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Bande dessinée - Noir

Cauchemar dans la rue

Social - Vengeance - Urbain - Trafic MAJ mardi 18 juin 2013

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 18 €

David Sala (scénario & dessin)
Scénario adapté de l'œuvre de Robin Cook
Nightmare In The Street - 2013
Traduit de l'anglais par Jean-Paul Gratias
Paris : Casterman, juin 2013
100 p. ; illustrations en couleur ; 26 x 19 cm
ISBN 978-2-203-04641-2
Coll. "Rivages/Casterman/noir"

Vision honni-rique

David Sala fait étalage de toute sa palette de dessinateur pour adapter Cauchemar dans la rue, de Robin Cook, passant alternativement de l'aspect gravure à celui plus photographique, sans omettre une tonalité pastel qui tranche avec des pages rouge sang pour mieux visualiser la violence, la vengeance avortée et la déchéance. Toute cette bande dessinée repose sur ce combat perpétuel entre l'onirisme et le cauchemar. Et pourtant, c'est à une réalité bien crue que nous avait convié le romancier anglais. L'histoire est simple : deux amis à la vie, à la mort. L'un flic, l'autre voyou. Au milieu, une ancienne prostituée, sortie du calvaire où elle avait été plongée (on peut plonger dans ce calvaire-ci), et qui est tombée amoureuse du flic. Ce flic pour qui depuis le monde est amour, mais qui est bien trop violent pour plaire à sa hiérarchie. Kléber se retrouve sur le carreau, mais n'en accepte pas moins d'aider son ami Marc lors d'un échange de fonds. L'histoire ne tarde pas à baigner dans le sang, celui de trois braqueurs qui entendaient faire main basse sur le fric. Sans se l'expliquer, Marc et Kléber laissent filer le chef. C'est le détonateur d'une plongée dans les abymes de la souffrance pour Kléber. S'il rentre retrouver sa femme, Elenya, pour une soirée anniversaire pleine de passion, il se réveillera incrédule au son de sa voiture qui explose, Elenya au volant. Tout le désespoir d'un homme est alors décortiqué par David Sala. Il décline les sombres turpitudes d'un être, esseulé, qui veut se venger mais se retrouve pris au piège par sa trop profonde tristesse. Il veut du sang, mais il ne trouve que de l'alcool. Le dessinateur s'offre à chaque page quasiment une technique et une approche différentes. La rupture est omniprésente. La violence ne fait pas défaut. L'univers urbain de Robin Cook avec ses passants déshumanisés est habilement mis en relief. Le texte est tiré au cordeau, il va à l'essentiel, il n'habille pas le dessin, il s'en démarque. Au point que d'ailleurs il est absent pendant quelques pages où la violence visualisée se suffit à elle-même. Bande dessinée où texte graphique, c'est selon, l'objet ne plaira pas à tout le monde, mais tout le monde s'accordera sur le talent indéniable de David Sala.

Illustration intérieure


Citation

Apparemment la seule façon pour lui de comprendre l'existence, c'était de plonger le regard dans l'abîme qu'il longeait constamment. Il était trois heures moins le quart en ce matin du 10 octobre, le jour de son anniversaire. Il allait rentrer chez lui retrouver enfin sa femme... Et tourner le dos à ces trois morts qu'il laissait derrière lui.

Rédacteur: Julien Védrenne lundi 17 juin 2013
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