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Tout public
Paris : Albin Michel, mai 2013
438 p. ; 23 x 15 cm
ISBN 978-2-226-24838-1
Coll. "Spécial suspense"
Actualités
- 14/10 Nécrologie: Carré noir pour Peter Robinson
C'est arrivé le 4 octobre. L'éditeur britannique Hodder & Stoughton l'a rendue publique le 7 mais la nouvelle n'est tombée ici qu'hier jeudi 13 : Peter Robinson, le romancier créateur de la série des "Enquêtes d'Alan Banks", est décédé brutalement à l'âge de 72 ans "des suites d'une brève maladie" selon les indications données par son éditeur.
Pour moi qui ai lu dix-neuf des vingt romans de la série publiés en France et en ai chroniqué ici quatorze, qui en outre me demandais depuis quelques mois pourquoi il n'y avait plus de nouvelles traductions depuis Moissons sanglantes alors que six autres romans avaient suivi, un septième ayant été achevé juste avant son décès qui paraîtra en 2023 (Standing in the Shadows...) – sans compter Children of the Revolution paru entre Watching the Dark (Face aux ténèbres) et Abattoir's blues (Moissons sanglantes) qui a été laissé de côté par les éditeurs français – et qui me languissais de pouvoir enfin lire un nouvel opus c'est un étrange désemparement qui m'étreint. Bien autre chose qu'une simple tristesse qui se compenserait par d'intermittentes replongées dans les romans. Et qui ne tient pas seulement au fait que j'avais eu le plaisir de m'entretenir avec Peter Robinson à la faveur d'un de ses passages à Paris. C'est à la fois plus vague et plus oppressant, moins dicible – et ce ne sera, pour aujourd'hui, rien autre que cette petite dépêche à seule visée informative, histoire de "faire passer l'information".
Plus tard sans doute je saurai en dire plus...
Pour lire une annonce plus détaillée, et avoir par la même occasion un aperçu complet de la bibliographie de Peter Robinson, le mieux est encore d'aller visiter le site officiel de l'auteur (en anglais) qui d'ailleurs n'est pas à son nom mais à celui de son héros Alan Banks...
Liens : Beau monstre |La Vallée des ténèbres |L'Été qui ne s'achève jamais |Le Voyeur du Yorkshire |Matricule 1139 |Noir comme neige |Un goût de brouillard et de cendres |Le Coup au cœur |Tous comptes faits |Face à la nuit |Ne jouez pas avec le feu |Moissons sanglantes |L'Amie du diable |Toutes les couleurs des ténèbres |La Main du mort |Peter Robinson
British attitude
Peter Robinson délaisse un peu sa très (trop ?) classique série de romans de procédure consacrés à l'inspecteur Alan Banks pour ce roman qui, a priori, ne cherche pas non plus l'originalité à bride abattue. Qu'on en juge : après des années à Hollywood où il composait des musiques de films, Chris Lowndes revient dans son Yorkshire natal. Il a jeté son dévolu sur le manoir de Kilnsgate House ou, découvre-t-il, vécut une meurtrière, Grace Elizabeth Fox, condamnée à mort cinquante ans plus tôt pour avoir empoisonné son mari. Or Chris s'intéresse à son encombrant fantôme et constate peu à peu que cette ancienne infirmière durant la guerre n'avait pas le profil d'une tueuse froide et méthodique. Et si elle était innocente ? Mais alors, qui a tué le mari ? Un point de départ quasiment bateau, qui pourrait être un pensum de Mary Higgins Clark ou un téléfilm du samedi soir ou les deux... si ce n'était la touche de l'auteur, comme un cuisinier capable d'assaisonner à la perfection le plat le plus banal.
Inutile de dire qu'il ne faut pas y rechercher le sturm und drang du thriller industriel, ses rebondissements à tout crins et ses chapitres courts (le livre suit son propre rythme à loisir, lent sans être long) ou la confrontation finale avec un assassin démoniaque™. La réalité se situe dans les êtres, d'abord avec un narrateur sympathique lançant quelques piques roboratives sur son métier. En prime, les carnets de la criminelle permettent d'éclairer un épisode méconnu de la grande guerre, celui concernant les infirmières dont le courage valait bien celui des combattants : occasion de livrer quelques pages poignantes et d'une grande humanité en évitant les clichés façon Sœur Courage. Si l'ensemble suit la logique de marabout d'ficelle, d'un interrogatoire à un autre entrecoupé de l'existence du narrateur, la conclusion est vraiment inattendue et, de plus, logique. Et bien sûr, roman British oblige, les classes sociales et les préjugés attenants (toujours d'actualité si on regarde l'Angleterre d'aujourd'hui) jouent un rôle prédominant...
La comparaison avec Agatha Christie et Daphné du Maurier de la couverture est justifiée, tant l'auteur réussit à jouer d'un certain classicisme sans jamais donner dans le poussiéreux, respectant la tradition du genre sans s'y laisser enfermer, avec en outre une très belle langue excellemment rendue par la traduction - ajoutons que pour une fois, le titre français est particulièrement bien choisi. Pour un peu, on aurait envie de se retirer dans la bibliothèque de son manoir du Yorkshire pour s'asseoir dans son meilleur fauteuil, un bon cigare et un verre de whisky vingt ans d'âge à portée de la main, pour profiter pleinement de ce roman. Et par moments, il n'y a pas à dire, ça fait du bien...
Citation
Quand on habite à l'étranger et que les gens vous demandent ce qui vous manque le plus, on répond en général, très spontanément : les pubs et le fish & chips. Il était intéressant de constater qu'il y avait là plus d'un semblant de vérité.