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Dernier convoi pour Buchenwald
Grand format
Inédit
Tout public
428 p. ; 25 x 16 cm
ISBN 978-2-7491-2308-0
Coll. "Romans"
Nuit & brouillard
La Seconde Guerre mondiale a eu son lot épais de romans, mais bien peu ont choisi les cadres décalés qu'utilise Roger Martin pour bâtir son intrigue. Difficile de faire du neuf avec une situation que l'on croit connue de tous, mais c'est là aussi tout l'intérêt de cet auteur sur l'ensemble de son œuvre : essayer de présenter un regard neuf, d'avoir un angle d'approche journalistique associé à des velléités d'historien, pour aborder des événements déjà connus. Pour ce faire, il va utiliser un type de personnages rarem dans le cadre des réseaux de résistance : Robert, jeune idéaliste trotskiste qui fait à la fois son éducation politique, son éducation professionnelle et sentimentale au sein d'une période troublée. Il en profite pour évoquer la fraternisation entre ouvriers français et soldats allemands sur des bases idéologiques. C'est l'occasion également de rappeler les difficultés de toute organisation politique entre une base qui vit dans le concret et une direction qui se gargarise de théorie.
Toute une partie de Dernier convoi pour Bucenwald est donc consacrée à la description simple et intelligente d'une activité résistante de base, sans trop de fulgurance, où les astuces pour pouvoir éditer un tract sont l'objet d'un bon suspense. Mais le réseau est démantelé et Robert mis en prison avant d'être déporté. Là, le récit bascule dans un autre épisode méconnu : des résistants et des fonctionnaires impliqués dans Vichy essaient d'organiser la libération pour éviter que les communistes n'y aient une trop grande part. Aussi ils exercent un chantage sur Robert afin qu'il se charge d'une mission. Déporté à Buchewald, il doit liquider un chef communiste. C'est l'occasion pour Roger Martin de montrer une réalité rude. Si le convoi est raconté de manière connue (avec quelques élans de solidarité), c'est la description de la vie dans les camps avec son organisation interne, ses manœuvres, ses règlements de comptes sournois, sa lutte à l'intérieur même entre politiques et droits communs, entre différentes factions politiques, qui est au cœur d'une description méticuleuse, pleine de suspense, et où, avec un style acéré et sans pathos, Roger Martin rend compte des difficultés qu'il y a à survivre, en restant humain.
À la manière des documentaires-fictions qui se font la part belle à la télévision, l'auteur sait donc incarner dans des personnages intelligemment dressés, des faits historiques peu connus, parfois liés au quotidien (comment faire rouler une bicyclette lorsqu'il n'y a plus de caoutchouc ?) et reconstitués avec force, leur insufflant la mentalité d'une époque où l'espoir d'un monde meilleur faisait encore rêver les jeunes générations.
Citation
Que peut-il y avoir de pire que cet enchevêtrement de corps transformés en loques ou en pelotes de nerfs à vif, où un genou osseux sous votre omoplate est un poignard effilé, où des ongles noirs et battants se transforment en autant de lames de rasoir ?