Contenu
Poche
Inédit
Tout public
216 p. ; 18 x 12 cm
ISBN 979-1092086003
Coll. "Roman"
Demander ses gages
On le sait, le monde regorge de petits génies dotés de la science infuse de l'écriture, pour qui dix "tro kool lol mdr" sur les réseaux sociaux constituent la validation de leur supériorité, qui ne se laissent pas décourager par de simples détails telles que les règles de grammaire et de syntaxe les plus élémentaires, ni le souci de raconter une histoire, mais que les méchants éditeurs, vilains qu'ils sont, refusent de publier alors qu'à chaque manuscrit, ils tiennent le nouveau Victor Hugo (ou à défaut le nouveau J. K. Rowling, lesdits impétrants ayant souvent une notion précise de la valeur commerciale de leurs efforts) parce que, heu... parce que ! Pour qui a tenté de défricher cette jungle où la liberté de tout publier est aussi celle de publier n'importe quoi, le terme d'auto-édité constitue un repoussoir. Mais dans ce cas précis, l'auto-édité a déjà trois romans intéressants derrière la cravate. On peut donc penser que le choix d'une auto-édition relève moins de l'absence d'éditeur que du principe qui veut qu'on n'est jamais mieux servi que par soi-même. Et les premières lignes le confirment : c'est écrit en français, il n'y a pas de fautes élémentaires, et il y a même un souci de, pour paraphraser Mickey Spillane, prendre le lecteur par les cojones dès la première phrase, bref, du travail de pro...
Greg Vadim est un tueur à gages qui espère mener à bien son centième contrat. Sa motivation est simple : sa fille Camille est devenue une jeune femme dont il entend bien se rapprocher. Pourquoi ne pas profiter de ses dons pour le bricolage et entamer une nouvelle carrière ? Mais on le sait, il n'est pas facile de raccrocher...
La figure du tueur à gages a été beaucoup traitée, ne serait-ce qu'à travers la série de Barry Eisler consacrée à John Rain. Posant toujours l'éternel problème, vieux comme le genre, de faire l'apologie de quelqu'un qui fait son beurre en assassinant des gens pour de l'argent... Stephan Ghreener donne un côté French touch à sa série, qui commence par un prologue d'une justesse implacable : on aurait sans mal imaginé un Lino Ventura dans le rôle titre pour un film d'hommes des années 1970 à la José Giovanni. Cette tentative de rédemption, bien sûr, ne peut que tourner mal, et l'auteur mijote quelques scènes d'action haletantes parfaitement maîtrisées jusqu'au cliffhanger final. Le tout dans une langue à la fois travaillée et d'une efficacité redoutable qui enveloppe ces aventures d'un léger flou narratif presque onirique évoquant le regretté et sous-estimé Kaa. Bref, on se demande pourquoi aucun éditeur n'a tenté sa chance, vu le goût du public pour les séries. Éternelle frilosité concernant le poche ? Car ce roman, qui eût fait les beaux jours d'une collection comme "Spécial Police", a tout à fait sa place en petit format. Espérons qu'après ce démarrage en force, la série trouve son public...
Citation
Le cours de la vie était alors plus élevé que celui d'un baril de brut ou qu'une chaîne en or. On ne confiait pas ce genre de contrat à des petites frappes en mal de sensations fortes. Les armes à feu s'achetaient facilement, mais avec plus de difficulté qu'aujourd'hui. Les anciens militaires comme moi avaient encore la cote.