Contenu
L'Énigme de Saint-Olav
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'estonien par Jean Pascal Ollivry
Montfort-en-Chalosse : Gaïa, février 2013
330 p. ; 24 x 15 cm
ISBN 978-2-84720-288-5
Coll. "Polar"
Conte d'apothicaire
Voici encore un roman qui apporte de l'eau au moulin de la théorie de la dissolution des genres littéraires. Car qu'est-ce que ce livre ? Un roman policier ? Sans doute, puisqu'il y a meurtre (et même plusieurs, l'un pouvant cacher l'autre), et une sorte d'enquête, menée par un apothicaire du nom de Melchior, qui pourrait aussi bien se prénommer Hercule ou Sherlock, tant sa sagacité est extrême, ainsi que sa malice et sa (fausse) modestie : élémentaire, mon cher... Il y a aussi des indices (une pièce de monnaie, une chanson en forme d'énigme, etc.) et un coupable finalement démasqué. Le suspense lui aussi est garanti pur sucre et même très raffiné car, si Melchior a bien percé le secret de l'énigme, on peut dire qu'il fait tirer la langue aux lecteurs. Mais, pour le reste (en fait l'essentiel, car ce ne sont pas les énigmes policières bien concoctées qui manquent), nous sommes à des lieues d'un polar, si l'on pense à tout ce dont il est question dans ce livre qui se déroule à Tallinn (Estonie, les Français commencent un peu à le savoir, malgré leur ignorance colossale de la géographie, depuis l'entrée de ce pays dans l'UE et même dans l'euro, il leur reste seulement à le distinguer de la Lettonie et de la Lituanie et donc encore des progrès à faire), en l'an de grâce 1409. Et l'auteur prend prétexte de l'assassinat de messire Clingenstain, haut responsable de l'Ordre des chevaliers teutoniques, rien de moins, pour nous entraîner dans des considérations pour le moins érudites. Qu'on en juge : l'histoire (médiévale) de la Baltique et en particulier l'épisode des frères Vitaliens (dont on peut affirmer sans crainte de se tromper qu'il y a environ un Français sur... un million qui en a entendu parler), mais aussi les ordres monastiques, les confréries et les guildes, les Sept Arts (qui, dans ce livre, ne sont même pas ceux que connaissent les plus instruits de nos compatriotes), le droit canon, la fabrication de la bière, les poisons, les échecs (non pas simplement en tant que sport cérébral mais comme image de la vie), etc. A-t-on jamais lu (et conçu) polar plus érudit ? C'est douteux et, si oui, il ne doit pas en exister beaucoup. Ce livre n'est donc pas vraiment destiné à l'amateur de polars trépidants et haletants, car il faut suivre les raisonnements - assez tortueux - de Melchior, mais l'affaire est très complexe. En revanche, ceux qui aiment voir ressusciter tout un pan (inconnu) de l'histoire mondiale et de celle des mentalités seront à la fête. Au total, on peut dire que cette entrée du polar estonien en France est remarquable, même si elle est un peu exigeante pour le lecteur. Mais les grandes satisfactions littéraires sont à ce prix, non ?
Citation
Je te remercie de tout cœur, frère Hinricus, en mon nom et au nom du Conseil. Je crois que tu m'as aidé à faire un petit pas vers la solution de tout ce mystère.