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Grand format
Inédit
Tout public
272 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-213-66317-3
Coll. "Littérature française"
Bonheur à crédit
Lorsque Marcel Aymé voulait écrire des histoires proches du fantastique léger qui était le sien, il utilisait un personnage récurrent qu'il appelait Martin. Peut-être aussi parce que c'est l'un des noms les plus répandus en France. Dernier désir s'ouvre également par la rencontre de deux Martin. Le premier est dans l'air du temps : lui et sa femme ont décidé de quitter le monde des apparences, de l'Avoir, pour une petite maison au bord d'un canal. Là, ils peuvent mener leur discrète vie écologiste, un peu bobo. Le seul qui souffre un peu, c'est leur fils, éloigné des jeux vidéo et des téléphones portables. Le nouveau Martin qui arrive devient - un peu comme l'invité dans Théorème de Pasolini - celui qui va apporter la confusion dans un univers ordonné. En effet, ce deuxième Martin semble n'avoir ni goût ni couleur, et essaie peu à peu de se transformer en l'autre Martin, un Martin cependant plus accompli, qui chercherait aussi à réussir. Il faut dire qu'il semble avoir une réserve inépuisable d'argent.
D'un coin tranquille de la France profonde, d'un endroit qui semble respirer le calme, vont sourdre des désirs, qui, comme tous désirs, sont à la fois des révélateurs et des destructeurs. Finalement, dans le couple, madame Martin n'aime pas autant que cela l'austérité monacale des écologistes et son fils a bien du mal à se satisfaire de la pêche comme seule activité ludique. Lentement, patiemment, le roman qui s'apparente au noir, laisse en suspens la question du fantastique. Ce Martin qui a déboulé est-il un homme en manque, un être incomplet qui trouve plus simple de prendre la vie entière (femmes, enfants, goûts) de son voisin, une sorte de personnage à la Boileau-Narcejac/Chabrol qui s'emparerait d'une vie rêvée ? Est-ce un diablotin venu offrir des tentations d'Avoir dans un monde où l'on rêve d'Être ? Un démon qui transpire le désir par tous les pores de la peau - comme dans une scène centrale du roman où une coiffeuse bon chic bon genre se transforme en pure pulsion sexuelle en coiffant Martin ?
Jusqu'au final, les deux hypothèses se répondent avec un soin extrême, une précision stylistique qui allie descriptions fines des gens et des choses, qui montre des types humains avec justesse et une pointe d'humour, comme un Voltaire ou la Bruyère contemporain qui aurait décidé d'écrire un roman sombre, comme quelqu'un qui sait que les plus placides mares de la plus belle eau cachent des monstres gluants.
Citation
Clara regarde la nuque dégagée, l'envers des oreilles, la peau si pale et lisse, ne refrène pas son désir d'un peu se pencher en avant pour plonger vers le torse qu'elle ne fait que deviner dans l'embrasure de la blouse