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Ce qui n'est pas écrit
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'espagnol par Myriam Chirousse
Paris : Métailié, janvier 2014
240 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-86424-943-6
Coll. "Noir - Bibliothèque hispanique"
Un thriller labyrinthique !
Carmen et Carlos ont divorcé après sept ans de mariage. Si la rupture fut difficile, le ressentiment s'est apaisé. Carmen accepte que Jorge, leur fils adolescent, parte pour une randonnée de trois jours avec son père, un père, cependant, violent dont son fils a peur.
Après leur départ, Carmen, qui travaille dans l'édition, trouve un manuscrit de Carlos portant pour titre Sur la femme morte, accompagné d'un petit mot : "Ça ne t'engage à rien, j'ai déjà un éditeur (Cosmos). Je veux juste que toi tu le lises."
Malgré les efforts de Carlos pour installer une complicité, Jorge reste sur la défensive. Son père veut en faire un homme, estimant que sa mère le surprotège.
Carmen commence la lecture du manuscrit qui raconte les étapes d'un enlèvement. Elle note de curieux rapprochements avec leur propre histoire.
Malgré les différents appels, elle ne peut les joindre car Carlos a pris le téléphone portable de son fils sous un prétexte futile.
Carmen continue sa lecture, une lecture qui l'angoisse de plus en plus. Jorge, qui veut faire plaisir à son père en essayant de répondre à ses attentes, sent monter la peur. Et Carlos qui boit de plus en plus de whisky...
Rafael Reig est un écrivain et critique littéraire espagnol né en 1963. Bien qu'ayant commis de nombreux livres, seul Ce qui n'est pas écrit, paru en 2012, est traduit en français.
Dans ce roman l'auteur propose une construction novatrice en intégrant une fiction de fiction dans une fiction. Il invite son lecteur à suivre, alternativement, la progression, semée d'embûches du père et du fils, celle de Carmen, restée seule, qui découvre le contenu du manuscrit et celles des personnages du roman, noirs à souhait.
Dès les premières lignes, Rafael Reig instille un climat de tension et d'inquiétude. Il détaille revenant les difficultés du couple, les raisons du divorce, renforce le sentiment de malaise avec ce roman noir, sorte de miroir. Il joue avec des scènes ambiguës, des vocables qui recouvrent une triste réalité, la description d'un univers sordide, des situations humiliantes dont le souvenir ravive des plaies. L'auteur maintient la pression en terminant certains chapitres par une définition de cruciverbiste, puis en donnant la solution au début du chapitre suivant, des mots au sens de plus en plus menaçants.
Rafael Reig, à travers son récit, explore le mariage, les relations d'un couple, les raisons qui rapprochent deux êtres et, surtout, celles qui les séparent, qui les amènent à une rupture lourde de conséquences. Il évoque les différences de statuts sociaux, l'ambition naturelle qui anime le début d'une vie, les désillusions qu'engendrent des ratages successifs tant dans le domaine professionnel que sentimental.
Il truffe son récit de remarques sur l'acte d'écrire, sur les liens qui peuvent unir l'auteur et son lecteur, sur les rapports qu'ils peuvent entretenir. Il estime, par exemple, que : "Celui qui écrit a le pouvoir, celui qui lit se soumet." Mais il reconnait que ce dernier peut avoir sa propre participation, son autonomie dans la lecture jusqu'à lire... ce qui n'est pas écrit, ce que l'auteur n'a pas couché sur le papier, implicitement ou explicitement. Or, n'est-ce pas, dans le manuscrit de Carlos, ce qui est à deviner qui est le plus effrayant, le plus angoissant ? Quelle sont les intentions de l'auteur, que veux-t-il dire, que peut-il cacher ? Il joue un étrange jeu de cache-cache qui prend le lecteur dans un piège et le force à une lecture tendue. Il est intéressant de noter le décalage opéré, par ce romancier diabolique, entre la qualité de rédaction de son roman et celle, plus commune, qu'il donne à son roman dans le roman.
Ce qui n'est pas écrit est un livre exceptionnel dont on ne ressort pas indemne.
Citation
La réponse, c'était la lecture qui la lui donnerait. Mais pour elle, il n'était pas si facile de continuer à lire : elle en savait trop. Elle en lisait trop, plus que ce qu'il y avait dans la page : elle lisait ce qui n'était pas écrit.