Contenu
La Fille de mon meilleur ami
Grand format
Inédit
Tout public
Mathilde est revenue
C'est avec un court roman tout en rythme que Yves Ravey revient faire une immersion dans un monde urbain et somme toute sordide avec un protagoniste dont on ne sait vraiment s'il agit par bonne conscience ou par calcul - du moins au début. Hommage aux Tontons flingueurs ? Oui et non. Oui, car l'intrigue commence par nous plonger dans cette bonne ville de Montauban au chevet de Louis Simonin, et que Louis Simonin, c'est un peu le double caché du Mexicain et de l'auteur de Grisby or not grisby. Non, car pour les similitudes on s'arrêtera là. Si Louis a bien une fille, Mathilde, celle-ci est à l'abri d'un hôpital psychiatrique après un divorce qui a mal tourné. Du moins on l'imagine comme tel. Et puis William Bonnet, le meilleur ami de Louis, est assez éloigné de Lino Ventura. Déjà par la carrure, ensuite par ses agissements. Louis mort, William est contacté par Mathilde qui cherche à renouer avec son petit garçon dont elle a été séparée par un juge. On ne peut rien refuser à Mathilde, donc Louis prend le volant après avoir enfourné deux sacs de voyage dans le coffre arrière de sa voiture, et il conduit Mathilde dans la ville de son ex-mari Anthony qui s'est remis en ménage avec Sheila. On ne saura pas grand-chose de cette ville si ce n'est qu'elle a une rue Pierre-Brossolette, que les milk-shake sont les meilleurs de France, et qu'à l'usine c'est la grève parce que la situation économique n'est pas fameuse du tout. Mais ce qui importe c'est avant tout l'atmosphère qui se dégage de ce roman à l'écriture fine. C'est aussi le contraste entre les deux personnalités de William, qui est tout sauf une poire. Après une première partie où il apparait serviable et compréhensif, il se révèle à mesure que l'on comprend ses motivations. Car il est tout sauf un gentil garçon qui agit en souvenir des désirs de son meilleur ami. Yves Ravey dresse en quelques touches des portraits de personnages ordinaires mus par leurs propres envies de vie. Le plus équilibré entre tous est peut-être Anthony, un homme de principe entièrement paumé dans une jungle urbaine, trahi par Sheila (qui au final, ce n'est pas dit, le trompe peut-être pour mieux le sauver). Mathilde, elle, ne fait rien que des bêtises compulsives. Entièrement accroc à ses médicaments et aux amphétamines, elle dévalise les enseignes de lingerie fine, elle n'en fait qu'à sa tête, est caractérielle et proche de la nymphomanie. Elle sera le catalyseur de cette intrigue aidée bien malgré elle par des flics obtus et avisés dont ce gendarme à cheveux blonds. En cela, tel l'assassin, elle revient toujours sur ses pas... mais ne retombe guère sur ses pattes, préférant casser celles de son acolyte. Roman sociétal plus que social, quelque peu féroce et poétique, La Fille de mon meilleur ami s'ancre dans cette littérature avisée de personnages désabusés qui errent entre mesquinerie des faits et grandeur des idées.
Nominations :
Prix du livre Inter 2014
Citation
Ça a fait sourire l'officier. Il a toussoté, en me dévisageant. Je lui ai demandé pourquoi il me regardait comme ça. Votre visage, a-t-il continué de toussoter, je le trouve un peu vieilli, si on considère la photo de votre fichier.