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Grand format
Inédit
Tout public
384 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 978-2-36794-024-3
Coll. "Forcément noir"
L'État gris loup...
Un braquo. Fusils à canons sciés, cagoules, en plein Orléans Nord. En décrochant, les braqueurs ont percuté une ado sur son scoot. On va lui amputer la jambe. Le lieutenant Zollinger est sur l'affaire. On retrouve la voiture, une grosse berline repêchée dans la rivière, avec dans son coffre le cadavre d'un jeune acteur porno à autopsier non sans prévention : c'est le fils d'un gros industriel français, le genre à disposer d'appuis dans les hautes sphères de l'État. Lagardière, c'est son nom. Une onomastique qui fleure bon la haute société française... Lagardière donc, qui trempe dans toutes les sales combines de la République. Son parc, son manoir XVIIIe siècle, l'argent à ne pas savoir quoi en faire. L'État gris loup... Conversations feutrées, et le hasard d'une classe de maternelle où enseigne la copine de Zollinger : la fille de la châtelaine compte parmi ses élèves. Un simple dessin de l'enfant va alors éveiller la curiosité du lieutenant : que sont devenus les chiens de la meute de Lagardière ? Leur fils est décédé, battu à mort. Sans grand regret pour la famille semble-t-il. Les chiens ont été exécutés... L'enquête avance difficilement. Forcément : la République n'aime pas que l'on fouille dans ses placards. Mais un jour, un flic aborde Zollinger en privé. Rien d'officiel surtout ! Chargé de la répression financière, il a beaucoup à raconter sur les pratiques de Lagardière. Il étale devant lui des photos où l'on voit le fils défunt en bien mauvaise compagnie. Une compagnie que le père semblait fréquenter. Cette histoire-là commence en Ukraine. Lagardière y avait investi beaucoup d'argent alors qu'il était secrétaire d'État... En fait de société, on l'aura compris, Lagardière dirigeait une pompe à fric pour le compte des partis de Pouvoir. Un scandale avait bien éclaté, mais il fut vite étouffé. Le contribuable, comme à l'accoutumée, s'étant chargé de régler les dettes de l'industriel marron. Mais la Russie s'en était mêlée : l'Ukraine bougeait trop, l'opposition menaçait ses intérêts, la mafia russe elle-même en voulait à Lagardière de la traiter aussi cavalièrement. Alors, de là à penser que l'assassinat du fils était le fait d'une sombre menace planant sur les intérêts de l'industriel... Zollinger enquête, mais risque gros sur ce coup. Filé, victime d'intimidations. On lui tire dessus. Il fait feu. Son lent voyage vers la vérité est comme un long voyage d'ébriété. Il faut du temps pour qu'un peu de conscience nous vienne. Ce temps que nous accorde Damien Ruzé dans cet étonnant fil de récit qui aime à flâner en longues descriptions placides. Le terroir languide, les routes à platanes où les gosses viennent s'écraser le samedi soir, les boîtes de nuit ringardes, la province confinée. De ce temps du récit qui nous rappelle qu'écrire n'est pas se presser de nouer des fils convenus en petites phrases paresseuses, ni trépider sur place ou moins encore haleter d'un rebond l'autre, mais prendre le temps de poser une atmosphère, d'y loger son lecteur, d'y résider soi-même comme dans ce beau portrait de flic submergé d'émotions, languissant un dénouement qui pourrait tout aussi bien être le sien, le nôtre, à nous contempler dans son miroir.
Citation
Les gars ne se rendent pas compte, mais Chicago de nos jours, c'est dans le Loiret.