Les Grandes affaires criminelles de l'Ain

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Essai - Policier

Les Grandes affaires criminelles de l'Ain

Assassinat - Procédure - Faits divers MAJ jeudi 15 mai 2014

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 26 €

Frédéric Boudouresque
Riom : De Borée, avril 2014
352 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-8129-0704-3
Coll. "Histoire et documents"

Hein ? Ain ? 1 ?

Il aurait dû être le premier ! Voilà, enfin, le département de l'Ain dans la riche collection "Histoire et documents" de De Borée après presque toute la France ! Mais ce devait être pour mieux sauter les haies des pièges désormais bien connus de ce type de recueil chronologique d'affaires sanglantes. Frédéric Boudouresque relève le défi haut la main : très bonne écriture, pas de novélisation, pas de dramatisation gratuite, excellente documentation bien choisie et diverses (photos, dessins, croquis d'enquête, unes de journaux, gravure). Même les illustrations modernes de Nic Putigny sont intéressantes. On retiendra l'échange surpris entre Vacher et le juge, l'impressionnante photo du cadavre de Pollet en 1920, et le schéma de scène de crime de l'affaire Flaguais en 1917 où une pauvre vieille veuve est assassinée dans son sellier, comme des centaines de ses semblables le furent dans nos riantes campagnes avant la création du Livret de Caisse d'Épargne.
Trois grandes affaires connues se détachent de l'ouvrage : en 1862, Dumollard, le tueur de bonnes, se fait passer pour le recruteur d'une châtelaine et entraîne d'innocentes filles dans des trajets tortueux au milieu de sombres forêts pour les détrousser, les violer, voire les tuer. En 1898, Vacher, le tueur de bergères (et de bergers), sillonne les campagnes pour se louer dans les fermes tout en massacrant ses victimes selon d'horribles protocoles que le juge Fourquet est le premier à mettre en évidence, inventant le profilage moderne et permettant surtout de relier toutes les victimes entre elles. En 1839, le notaire Peytel monte un terrible traquenard au cours d'un voyage nocturne avec deux calèches où sa femme et son domestique perdent la vie. "Le double crime du pont d'Andert" deviendra une cause célèbre car Peytel a écrit des pamphlets à Paris et y possède encore des amis influents. Balzac viendra même sur les lieux pour reprendre l'enquête. Mais ni lui, ni les autres ne parviendront à innocenter Peytel. Ces trois affaires ont été développées en livres par le talentueux magistrat Pierre Bouchardon et c'est dommage de ne pas les avoir citées dans la bibliographie annexe. Mais oublions ces détails car malgré ces autres écrits qui pourraient lui porter ombrage, Frédéric Boudouresque sait insuffler à ces histoires l'ambiance nécessaire à leur frissonnante lecture : la forêt profonde de Dumollard, les petites montagnes de Vacher, le paysage d'un romantisme noir de Peytel...
On ne peut citer toutes les affaires de cet excellent ouvrage mais on retiendra celle de "L'Empoisonneuse de Bugey", contemporaine à celle de Marie Besnard, qui conduisit Marguerite Doux, une Messaline de campagne pourtant bien vilaine d'après les photos, devant les tribunaux pour l'empoisonnement de trois de ses enfants et de ses deux maris (un veuf et un divorcé avec chacun sept enfants !). Autre personnage incroyable : Claude Feuillet, perçu comme l'idiot du village, découvre qu'en se déguisant en femme ses crises d'épilepsie disparaissent. Dans les années 1850, l'homme s'avère roué et avare. Il amasse un pécule qui fait loucher ses voisins. Ils lui marie leur fille et Claude doit donc s'habiller en homme. Un enfant naît, sa femme ne pouvant allaiter, Claude doit chercher une nourrice. Mais une nourrice ça coûte cher... Finalement, notre idiot se débarrassera et de l'enfant et de l'épouse avant de se rhabiller en femme. Autre histoire : "L'inverti parricide" nommé Double et qui assassine sa mère, la veuve Chaste, pour entretenir son gigolo nommé Courtgibet. Emprisonné, Double consigne son histoire sur cahier à la demande du célèbre professeur Lacassagne. Frédéric Bourdouresque exhume ce texte et explique la démarche du scientifique lyonnais. On reviendra aussi sur les sept morts d'Orgères, un massacre de tous les habitants d'une ferme, égorgés avec les mains liées dans le dos en 1797, épisode typique des méfaits des bandes criminelles, et le parcours de Jean-François Blanc-Gonnet en 1868, adopté à deux ans par un couple riche qui lui donne une excellente éducation avant que tout dérape dans la débauche et la violence avec le meurtre de sa mère adoptive.
Un excellent tome, donc, qui allie justesse d'écriture, descriptions pertinentes et rythme motivant.

Citation

En le voyant débarquer à l'improviste à dix heures du soir, Mme Chaste l'accueillit plutôt froidement.

Rédacteur: Michel Amelin mercredi 14 mai 2014
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