Ghosting

Elle avait envers moi une espèce de condescendance presque agaçante. Mais elle avait raison sur deux choses : j'avais merdé, et la justice ne me lâcherait pas. Intérieurement je maudissais Walter et son arrogance. Intérieurement, j'avais envie de lui avouer que c'était l'autre, que je n'y étais pour rien... J'ai fermé ma gueule naturellement, et j'ai continué à faire profil bas.
Fabrice Pichon - Plusdeprobleme.com
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Roman - Noir

Ghosting

Ethnologique - Social - Drogue MAJ mardi 20 mai 2014

Note accordée au livre: 5 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 21,5 €

Kirby Gann
Ghosting - 2012
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Jean Esch
Paris : Le Seuil, avril 2014
372 p. ; 23 x 14 cm
ISBN 978-2-02-109652-1
Coll. "Policiers"

Après le dernier fantôme d'espoir

Parfois, les journaux font leurs choux gras des banlieues et de leur population se livrant aux plus vils trafics. Même s'il y a peut-être une once de vérité derrière ces méfaits, sont-ils le fait d'une ethnie particulière ou la simple détermination sociale ? En Europe, les débats sont animés mais les romans qui nous arrivent des États-Unis semblent offrir une autre vision. Au fond du Kentucky, dans une région de petits blancs, le trafic de marijuana semble être la dernière activité économique à la mode de la région. Gruel, le producteur local, règne sur la ville. De fait, les décors sont plutôt des usines en ruine, des bâtiments publics en déshérence, des petites maisons de bois où chacun soigne ses plaies et son mal de vivre comme il peut. Le roman s'ouvre de manière symbolique avec une balade dans les vestiges d'un séminaire à l'abandon, même Dieu ayant abandonné ce coin. Cole est revenu vivre chez sa mère et son frère. Le père ? Disparu dans une sombre tragédie des années plus tôt, la mère soignant sa neurasthénie avec l'ensemble des substances chimiques ou herbeuses qui lui passent sous la main. Fleece, le grand frère, bichonne sa voiture mais il disparaît un jour, et seule sa voiture est retrouvée, mais carbonisée. Fleece travaillait pour Gruel : a-t-il été tué ? A-t-il été puni pour avoir essayé de détourner une partie du trafic ? S'est-il sauvé avec la livraison de Marijuana que Gruel attendait ? Pour répondre à ces questions, Gruel charge Cole de mener son enquête...
Kirby Gann n'est pas intéressé par l'enquête, au sens strict : des pistes s'ouvrent, s'épuisent dans les champs, s'enlisent dans les forêts profondes. Ce qui l'intéresse c'est la façon dont Cole doit reconstruire une vie avec tous ces fils épars, en plaçant ses pas dans ceux de son frère. Et c'est une tache impossible, qui ne peut que conduire à la tragédie. Kirby Gann enfonce son héros dans un style qui sait prendre son temps à chaque page, laisse de longues plages vides, dissèque les humeurs des personnages en les plaçant dans des décors de ruine, des paysages naturels. Cole ne peut pas parler avec son frère disparu, ni avec sa mère enfoncée dans ses paradis artificiels, ni avec Gruel sur le point de mourir et qui veut encore frapper pour laisser un empire à son fils, ni même avec celle dont il aimerait partager la vie.
Comme dans une tragédie classique, le récit s'ouvre sur une douleur et des solutions sans issue autre que la mort ou la déchéance. L'action ne se déroule pas dans les palais mais chez les Blancs paumés au milieu d'une nature qui ne sait plus réconforter, dans les débris de l'âge industriel moribond. Mais les personnages et les sentiments, souvent non-dits, exprimés par des gestes qui restent incompris des autres acteurs, touchent aussi à l'universel, comme dans les romans de William Faulkner ou ceux de Donald Ray Pollock. Comme son titre l'indique, le roman est une histoire de fantômes, des fantômes vivants et sans espoir, encore plus effrayants que de vrais fantômes où la seule chaleur qui advienne est celle d'une voiture qui flambe où d'un transformateur explosé par un orage.

Citation

Il se penche pour l'embrasser mais elle est déjà descendue. Il lui dit qu'il l'appellera plus tard ; elle lui répond qu'il peut faire ce qu'il veut.

Rédacteur: Laurent Greusard vendredi 16 mai 2014
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