Finie la comédie

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Roman - Thriller

Finie la comédie

Politique - Enlèvement - Guerre - Terrorisme MAJ vendredi 06 juin 2014

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 21 €

Donald Westlake
The Comedy is Finished - 2012
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Pierre Bondil, Nicolas Bondil
Paris : Rivages, mai 2014
400 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-7436-2810-9
Coll. "Thriller"

Madeleine au poivre

Ce texte est sans aucun doute un ancien roman laissé dans les tiroirs, ne serait-ce que pas son positionnement chronologique à la fin des années 1970 et quelques indices dans la narration - l'obligation de poser des lignes téléphoniques pour pouvoir entamer une discussion avec des kidnappeurs. Mais cela n'en fait pas pour autant un fond de tiroir, et son titre insère bien le livre dans la "série" que Donald Westlake a consacré aux failles du rêve américain et qui l'a fait connaitre du grand public avec Le Couperet.
Finie la comédie signale bien la double ambiance du roman : une chronique douce et amère. Pour la douceur, le temps qui passe, les retrouvailles entre un père et son fils, le rappel des temps heureux où le monde était simple. À un instant, Koo Davis, le personnage central, comique engagé de droite, fait une tournée en Corée pour remonter le moral des troupes. Il est confronté à un soldat prisonnier endoctriné revenu des geôles nord-coréennes. Il croit pouvoir le "ramener à la raison" mais c'est peine perdue. C'est le moment où le personnage pourrait quitter l'innocence de son mode de vie, mais il ne le fera pas.
L'amertume nait de l'intrigue : pour faire plier le gouvernement, des gauchistes kidnappent le comique et veulent l'échanger contre des prisonniers américains qu'ils estiment politiques. Les réactions de l'Amérique face à ses fils perdus, ces révolutionnaires idéalistes qui ont laissé passer la diligence de l'histoire, leurs propres doutes face à leur combat, sont l'occasion de fines observations sur les rêves disparus d'une génération. L'amertume se renforce lorsque l'on découvre que les gauchistes sous les verrous ne veulent pas être libérés car ils ont changé, muri ou refusent la violence. Elle se renforce encore plus en apprenant que le kidnapping a surtout pour but de propulser comme leader naturel de la révolution le chef du commando. Elle culmine quand un des kidnappeurs avoue que la cible a été choisie par lui car Koo Davis avait eu une relation avec sa mère, et qu'il l'avait abandonnée, enceinte !
Stylistiquement, l'écriture renvoie au titre car le début est une brillante satire des milieux télévisuels, comme sait le faire Donald Westlake. Elle reste ironique avec la première planque des terroristes, une villa de rêve qui possède une piscine, et où Koo Davis va faire émerger ses souvenirs, avant de virer au drame lorsque le lieu est repéré par la police qui alors intervient et où les antagonismes entre les gauchistes éclatent, comme si l'auteur renvoyait dos à dos, les deux univers - celui des communistes idéalistes et celui du maccarthyste convaincu.
Cette analyse fine et la pâte épaisse des enjeux psychologiques des personnages empêchent que le roman ne vire à la démonstration noire et cynique et signale que ce roman, même inédit, n'est pas un fond de tiroir d'un grand auteur, mais un roman de bonne facture qui a tout sa place dans la bibliothèque de l'honnête homme.

Citation

- Tu veux dire que tu te bats sans croire au caractère inéluctable de notre succès. Tu ne sais pas que, historiquement, on doit gagner ?
- Si bien sûr. Mais ça semble tellement long, parfois.

Rédacteur: Laurent Greusard vendredi 06 juin 2014
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