Contenu
Un chouette petit blot
Poche
Inédit
Tout public
96 p. ; 19 x 13 cm
ISBN 978-2-35306-020-7
Coll. "Suite noire", 21
Hôtel est pris
Dusty n'est pas seulement le liftier d'un hôtel de grand standing dans ce roman de Laurence Biberfeld écrit en 2008. Non, Dusty est aussi (et surtout) le garçon de nuit d'un grand hôtel dans le roman de Jim Thompson, Un chouette petit lot. Et, d'un coup, le lecteur de cette chronique comprend que le livre dont il va être question est un hommage à l'un des récits du grand écrivain américain. C'est d'ailleurs l'une des trois contraintes de la collection "Suite noire" lancée par Jean-Bernard Pouy aux éditions La Branche. Première contrainte : avoir été édité dans la "Série noire" gallimardienne. Contrainte qui très vite sera contournée. Deuxième contrainte : rendre hommage à un ouvrage de ladite collection culte avec une intrigue différente mais pas que (et par forcément). Enfin, troisième contrainte : trouver un titre de roman qui hésite entre jeu de mots et résonance homophonique. À ce jeu, Laurence Biberfeld s'en sort de façon très louable avec un texte en 96-pages et vingt chapitres. Son hôtel Hermès va être l'objet d'un joli incendie dans tous les sens du terme. Non pas par l'arrivée imminente d'une rousse incendiaire (le chouette lot) mais par la concomitance d'événements improbables avec une réunion d'individus hauts en couleur. L'hôtel héberge un rassemblement d'écrivains de littérature policière (donc qui envahissent le bar), mais aussi les actionnaires de la chaîne, deux opposants écologiques africains à d'obscurs régimes politiques, un tueur à gages qui découvre son contrat avec un rébus en six cartes postales, un vigile qui rêve de réintégrer les RG dont il a été viré pour incompétence congénitale, des sans-papiers escortés par des flics tous plus inhumains les uns que les autres en attente d'extradition, des activistes pacifistes dreadlockus et cinquante-cinq femmes de ménage exploitée d'origine africaine. Et puis il y a un grand chauve, le directeur. L'événement déclencheur d'un drame en série sera la mort accidentelle d'une des femmes de ménage (une crise cardiaque après une ébauche d'interrogatoire par le tueur à gages à qui on a dérobé une carte postale lors d'un imbroglio sur fond de numéro de chambre lu à l'envers et de savon à la lavande). Après, l'on tombe de Charybde en cascade, et la traversée du hall s'avère périlleuse même pour Ulysse. Tout est foutraque mais pour autant ne part pas dans tous les sens. Fidèle à son amour du noir, Laurence Biberfeld assène tout au long de son intrigue force messages politiques (écologie, sans-papiers, immigration, dérives policières et politiques, abus du capitalisme, prostitution déguisée, exploitation, revendications syndicales... On en passe et des pires tout en n'évitant pas la redondance). Et absurdité de la chose, si l'hôtel brûle au final, c'est sous les yeux d'une population qui bien souvent est dans un tout autre type d'hôtel et du côté des victimes. L'ensemble est donc de tenue sympathique et se lit avec délectation. Du bel ouvrage.
Récompenses :
Prix marseillais du polar 2014
Citation
Roger vit poindre le moment attendu depuis la crèche, où il cesserait enfin de passer pour un con auprès de ses petits camarades. Pour se donner une contenance, il commanda une épaule de poulpe aux câpres.