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Roman - Thriller

La Compassion du diable

Tueur en série - Enquête littéraire MAJ lundi 13 octobre 2014

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 19,9 €

Double cannibale

Parfois la couverture est une réussite qui indique déjà le contenu d'un livre. Ici, le "a" et le "e" du mot "diable" sont en projection l'un de l'autre, comme si la nature même du monde était ambivalente. Dans La Compassion du diable, le nouveau roman de Fabio M. Mitchelli, deux personnages se répondent : un policier et un romancier, comme deux lettres inversées, deux faces aussi obscures l'une que l'autre. Fabio M. Mitchelli parvient stylistiquement à travailler leurs trajectoires individuelles, à les faire se recouper avec celle du tueur en série, surnommé Blake, sans qu'il soit facile de savoir si l'un des deux est le tueur ou s'il s'agit d'un troisième homme.
Ce doute qui court sur une bonne partie du roman, ces ouvertures, permettent aussi d'éviter un défaut évident du genre : le manichéisme. Répétant régulièrement le modus operandi du tueur, dans une ambiance très sadienne - c'est-à-dire aussi froide et clinique, répétitive et quasi ennuyeuse -, l'auteur reste dans la marge grise où il ne prend pas partie, de manière trop flagrante, mais semble décrire les actions comme autant de passages obligés de la vie de quelqu'un.
Ce leitmotiv du double renvoie au départ même du roman où le tueur en série raconte qu'à l'intérieur du ventre maternel, il était avec son jumeau et qu'il a dû le tuer pour assurer sa propre survie, mangeant ses forces pour survivre. De son côté, Philip K.Dick, l'écrivain de SF racontait qu'il avait lui aussi partagé la pré-naissance avec une sœur morte, mais il avait fait de cette jumelle une force de vie, une compagnonne qui l'aidait dans sa quête spirituelle, comme si là aussi, écrire et tuer n'étaient que deux faces du même médaille.
Mais il y a un deuxième élément de cette couverture qui interpelle, un dessin qui semble abstrait de face mais qui dès que l'on penche légèrement la couverture devient éminemment macabre. Comme si la vie était simple mais s'avérait très complexe dès le léger décalage à l'instar des protagonistes du roman - un romancier qui visite un témoin mourant qui ne tarde pas à rendre l'âme (d'ailleurs l'auteur n'est-il pas quelqu'un qui cannibalise la vie des autres d'une manière métaphorique alors que le tueur le fait au sens propre ?), l'histoire d'un enfant qui semble jouer et qui en train de découper un animal, une policière qui lutte contre ses propres démons intérieurs.
S'inspirant de faits réels, le tueur anesthésie ses victimes, leur fore le crâne, les photographie. Quant à Fabio L. Mitchelli, il poursuit son travail autour du tueur en série. Là où il utilisait auparavant la démesure propre au genre, il écrit, de manière plus sereine, comme s'il avait enfin amadoué la part sombre qui est en lui (ou en chacun de nous). Évoquons juste cette scène où le tueur vient de commettre quelques actions sanglantes, a fait exploser quelques policiers qui venaient fouiller ses cachettes, et a couru dans les caves contre celui qui devait le stopper. Il remonte chez lui, entre, voit les policiers venus l'arrêter et s'assied en sortant une bière car la journée a vraiment été rude. Comme pour signaler que même ces "nouveaux héros" des temps modernes, ces nouvelles figures mythiques, après tout, méritent un peu de chaleur et de compassion.
En resserrant son propos, en créant des personnages hantés par leurs passés, en l'insérant dans une intrigue crédible et dans un univers familier et quotidien, Fabio M. Mitchelli crée une œuvre cohérente qui ne cesse de s'améliorer.

Citation

Je voudrais juste boire une bière avant d'y aller, les gars, j'ai eu une putain de journée de merde.

Rédacteur: Laurent Greusard samedi 11 octobre 2014
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