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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Anne Guitton
Paris : Liana Levi, septembre 2014
366 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-86746-736-3
Coll. "Policier"
Universalité du méchant
Pendant des années, l'imaginaire romantique occidental a séparé les grandes épopées révolutionnaires sanglantes et les criminels vulgaires. Récemment encore, l'on vantait les actions des Basques ou les Irlandais du Nord mais, aujourd'hui, les mouvements de libération ou d'indépendance ont pris un sacré coup dans l'aile, et l'on assimile encore plus facilement mouvements terroristes et grand banditisme. Il faut bien le dire, ces deux mondes cohabitent forcément même s'ils n'ont pas les mêmes objectifs car ils ont parfois besoin des mêmes solutions pour régler leurs problèmes : comment avoir de l'argent, comment le blanchir, comment franchir incognito des frontières, où se procurer des armes ?
Dans Le Chant du converti, nous retrouvons une ancienne connaissance en la personne de Valentin Pescatore, un ex-policier chargé des frontière devenu détective privé en Argentine. C'est là-bas qu'il retrouve Raymond, un ami d'enfance un chanteur un brin gangster, qui lui donne son numéro de téléphone. Quelques jours plus tard, Buenos Aires se trouve au cœur d'une tempête terroriste et Valentin Pescatore reçoit un coup de fil le mettant dans la ligne de mire des agences de sécurité du "monde libre". Pour se disculper, le détective doit retrouver son ami Raymond, qui navigue au cœur des relations ambiguës entre islamisme, jihad, trafiquants de drogue et services secrets de tous bords.
Sebastian Rotella est journaliste, et cela se sent dans cet ouvrage encore plus que dans le précédent : une documentation impressionnante permet d'éclairer des zones d'ombre, de présenter des faits qui montrent bien la collusion entre différents acteurs - les islamistes ne ont un intérêt dans les trafics de drogue car cela affaiblit l'Occident, les services secrets iraniens collaborent avec des terroristes d'obédiences religieuses diverses, les services secrets américains emploient des truands qui jouent les agents doubles ou triples quand ils ne sont pas quadruples. Au fil du roman, on ne sait si Raymond a des remords de quelque chose ou s'il mange à tous les râteliers pour être sûr d'avoir un peu de foin. On suit les déambulations de Valentin Pescatore sur différents continents pour cerner au mieux les fils de son enquête, et les investigations journalistiques de son auteur. Ce dernier nous présente une vision géopolitique du monde actuel : celle où les anciens repères et les oppositions idéologiques s'effacent devant les intérêts particuliers de chaque État ou des factions à l'intérieur des États. Bien sûr s'ajoutent les envies individualistes de chacun des acteurs. Au final, Sebastian Rotella offre un bon roman géopolitique dont on ne connait les tenants et les aboutissants, et qui nous apprend à nous méfier de cette chose étrange qu'est l'amitié, surtout quand elle ressurgit à point nommé...
Citation
Il ne fit pas demi-tour, car il ne savait pas vraiment s'il finirait par aider Raymond ou s'il lui casserait la gueule.