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Lumière morte
Grand format
Réédition
Tout public
Préface de Michael Connelly
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Robert Pépin
Paris : Calmann-Lévy, octobre 2014
352 p. ; 21 x 14 cm
ISBN 978-2-7021-5537-0
Coll. "Robert Pépin présente"
Fiat lux
Lorsqu'ils combattaient au Vietnam, les soldats américains pensaient voir des lumières légères flotter autour d'eux, comme les âmes angoissées des morts qui les entouraient. Dans le même temps, ces lumières vibraient d'un minuscule espoir. Lumière morte raconte également ce minuscule espoir. Michael Connelly situe son roman à un mauvais moment pour son inspecteur Harry Bosch. Ce dernier a quitté le LAPD et vivote alors que son pays vient de vivre les attentats du 11-Septembre et entame une nouvelle politique sécuritaire qui met à bas les toujours fragiles espaces démocratiques. Cela s'incarne dans une scène au milieu du roman où Harry Bosch est emmené dans une prison privée, comme si nous étions en plein récit de la grande période stalinienne. Mais l'espoir renaît car c'est dans cette prison qu'il va apercevoir un élément qui lui permettra d'avancer dans son enquête. Car il faut bien parler de la lumière que lui a demandé de faire un policier, blessé gravement lors d'un hold-up et qui ne peut plus bouger, sur son affaire. Avant d'être atteint d'une rafale, il enquêtait sur la mort étrange d'une jeune femme, une assistante sur un film, retrouvée violée et assassinée, quelques jours avant que l'on vole une grosse somme sur le tournage d'un autre film. Enfin, il y a la lumière qui brille dans les yeux d'un agent du FBI dont la compagne a disparu il y a trois ans, sans doute, en liaison avec le vol précité. Une compagne qui n'est jamais réapparue...
Tout le roman tourne autour de cette confiance que l'on doit accorder : l'épouse qui s'occupe d'un policier blessé est-t-elle aimante, juste garde-malade car elle touche une pension tant qu'il survit ou a-t-elle fait de son mari un souffre-douleur ? Harry Bosch se pose des questions sur son ex-épouse et ce qu'elle lui cache. Sa collègue restée dans la police se méfie de lui car il l'a en quelque sorte abandonnée. Enfin, comment rester confiant dans ce monde de l'après 11-Septembre qui a érigé la paranoïa en mode de vie ? Peu à peu, Michael Connelly renoue tous les fils de son intrigue avec intelligence. Ce faisant, il montre une histoire glaçante : le plus horrible, c'est que chacun a ses raisons d'agir comme il agit, de penser petitement en fonction de ses propres intérêts (car la plupart des morts de ce roman ne sont que la façon la plus simple de s'assurer qu'ils ne parleront pas et ne mettront pas en danger une magouille glauque) et l'avalanche des cadavres n'est que l'addition des intérêts contradictoires de chacun des protagonistes. La bassesse est symbolisée par une caméra cachée dans une horloge que Bosch pose chez le policier alité afin de savoir si la femme aimante l'est vraiment, comme si même l'amour et la compassion étaient sujets à caution. La douleur de ce même Bosch est portée à son paroxysme lorsqu'il ne peut s'empêcher de chercher des renseignements sur son ex-épouse alors que celle-ci vient de l'aider...
Le final permet cependant de répondre aux questions, de retrouver (en partie) l'agent du FBI et pour Harry Bosch de redonner un sens à sa vie, car il y a quand même une petite lumière morte qui brille dans un coin obscur des ténèbres qui engloutissent notre monde.
Citation
Jamais je n'avais oublié son corps recroquevillé sur le carrelage à l'espagnole, ses mains comme tendues vers moi en un geste de supplication. J'avais enfin une mission.