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Entre toutes les femmes
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Inédit
La Voix du jeu
En nos périodes troublées, il convient de revenir au jeu. C'est sans doute une des leçons optimistes qui peut donner à la littérature une raison valable d'exister. Le jeu littéraire peut se manifester de multiples manières. Chez Erwan Larher, il prend tout d'abord l'idée de jouer avec les codes. En effet, son roman se situe dans diverses traditions françaises : le roman policier avec cette société où police, résistants, collaborateurs, coups fourrés des services secrets se côtoient, où arrestations arbitraires, tortures, exécutions sommaires, traîtrises diverses se répondent, où l'héroïne (un personnage et non une drogue) doit faire éclater la vérité. C'est également un roman d'anticipation car le cadre général de cette est clairement défini dans un futur où après une catastrophe mondiale, l'Europe est repartie dans une sorte de Moyen Âge, la France devenant un empire aux contours limités. C'est aussi un roman-fable avec morale car, mine de rien, le texte parle aussi de notre présent.
C'est un roman qui joue avec d'autres codes déjà bien connus. L'héroïne, Cybèle Ibarruri, est une animatrice radio très écoutée qui raconte des histoires et des fables. Un jour, elle est contactée par des opposants qui veulent qu'elle intervienne pour rétablir la vérité sur les origines de ce gouvernement impérial. Ces opposants sont les derniers "disciples" d'un culte étrange. Quatre siècles plus tôt, le dernier président légitime de la République française, Arsène Nimale, a tenté une nouvelle politique, et lors de son renversement, la famille impériale a rayé toutes les informations le concernant. Mais des archivistes fouillent les textes, les extraits, les brides afin d'écrire ces nouveaux évangiles.
C'est là que le travail de l'auteur se mêle d'humour et de jeu car les opposants sont divisés sur les textes réels et ceux apocryphes, sur les façons de les faire connaître au grand public, certains étant prêts à dénoncer leurs camarades pour faire gagner leur ligne politique... Erwan Larher évite ainsi l'angélisme de textes-romans-tracts des dernières années. En outre, plus la jeune femme plonge dans les textes anciens, plus elle découvre que loin d'être un homme politique parfait, le dernier président fut aussi un être complexe, grisé par le pouvoir qu'au départ il ne voulait pas avoir. Autre forme d'humour, le roman évoque d'autres romans qui font écho à celui-ci, que ce soit dans Autogenèse, un texte précédent du même auteur, qui racontait justement cette prise du pouvoir par Arsène Nimale ou celui d'Antoine Bello sur les falsificateurs de l'histoire (Les Falsificateurs, Gallimard), une des bonnes surprises de ces dernières années. Tout cela bien sûr sans évoquer les parallèles troublants qui pourraient être faits avec le Nouveau Testament.
S'appuyant sur un style de facture classique, avec une construction qui multiplie les points de vue, Erwan Larher sait à merveille se déplacer d'un personnage à l'autre ou dans le passé des acteurs de son roman sans perdre le lecteur, jouant avec humour sur les stéréotypes (la seule scène de torture qui sera vue est en même temps une scène érotique où la "victime" a l'air autant consentante que son "bourreau"). Il nous prouve que, comme les enfants le savent déjà, le jeu est un acte très sérieux
On en parle : L'Indic n°23
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Mais depuis que le Plan avait dangereusement radicalisé son engagement, il étouffait dans ses contradictions. Il était allé trop loin, sans demi-tour possible.