Contenu
Les Nuits de Reykjavik
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'islandais par Éric Boury
Paris : Métailié, février 2015
260 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 979-10-226-0153-5
Coll. "Noir - Bibliothèque nordique"
Les débuts d'Erlendur
Comme tant d'autres l'ont fait avant lui – et le feront sûrement après – Arnaldur Indridason revient sur les débuts de la carrière d'Erlendur Sveinsson, son personnage récurrent qui, ici, n'est encore que "simple flic" travaillant de nuit à de banales affaires d'ivrognerie et de violences conjugales. C'est d'ailleurs l'une de celles–ci qui l'amène à faire la connaissance de Halldora, dont il va bientôt avoir un enfant, ce qui mettra fin à sa paisible existence de célibataire. Mais il s'intéresse aussi, à titre "personnel", à la disparition, un an auparavant, d'un clochard alcoolique baptisé Hannibal qui a été retrouvé noyé dans l'eau d'une tourbière proche de Reykjavik. La raison en est qu'il a déjà eu affaire à lui et s'est pris de sympathie pour cet homme pas pire que les autres mais qui a été traumatisé par la mort de sa sœur, qu'il n'a pu sauver lors d'un accident qu'il a causé par imprudence. Cette culpabilité l'a amené à sombrer peu à peu dans l'alcoolisme et n'est pas sans rappeler celle d'Erlendur à propos de la disparition de son propre frère dans les montagnes alors qu'ils étaient jeunes. Il est aussi frappé de la coïncidence avec la disparition d'une jeune femme, Oddny, le même week-end. Or, il apprend par Thuri, ivrogne par moments "repentie", qu'on a retrouvé une boucle d'oreille dans le caisson entourant le pipe-line approvisionnant la ville en eau chaude qui était devenu le repaire de Hannibal, après son expulsion de la cave qu'il squattait pour avoir mis le feu à celle-ci (du moins aux dires de deux voisins avec lesquels il entretenait de très mauvaises relations). Erlendur finit aussi par découvrir que cette boucle d'oreille appartenait à Oddny. De quoi alimenter sa curiosité et une enquête "parallèle" (ce qui est d'ailleurs trop dire, car la police criminelle ne s'est pas intéressée à la mort de Hannibal, vite classée comme suicide dû à l'excès d'alcool retrouvé dans son cadavre, ni à la disparition d'Oddny, considérée comme volontaire à la suite de certains déboires conjugaux) et décalée dans le temps. Comme toujours, un événement fortuit (un cambriolage manqué !) met Erlendur sur la fausse piste obligatoire dans tout polar qui se respecte. Son flair l'incitera donc à se muer en terrassier et de trouver l'indice qui l'orientera dans la bonne direction et lui vaudra les tardives félicitations de sa supérieure. Ce volume est loin d'être le meilleur de la série. Devant ce whodunit qui ressemble à tant d'autres, on regrette l'originalité de La Cité des jarres et des autres épisodes du début, qui avaient trait à des facteurs spécifiquement islandais. On est ici dans une affaire assez banale, à part peut-être le fait qu'elle se déroule essentiellement dans le milieu des clochards, à laquelle la disparition du frère d'Erlendur sert une nouvelle fois de toile de fond (mais, à force, le ressort perd de son efficacité). Tout filon finit par s'épuiser, si on l'exploite un peu trop. Pas plus que les autres auteurs de ce genre de séries basées sur un personnage récurrent, Arnaldur Indridason ne devrait négliger cette vérité mais au contraire s'inspirer de ceux qui ont su s'arrêter à temps et varier les plaisirs. Même s'il ne dispose peut-être pas des remarquables aptitudes d'un Henning Mankell en ce sens, ce ne sont pas la capacités de "reconversion" qui lui manquent.
On en parle : Carnet de la Noir'Rôde n°55
Citation
Sa vie était un voyage sans but et, en voyant l'autobus s'éloigner de Hlemmur, Erlendur avait presque l'impression de se voir à sa place, voyageur solitaire et sans but, condamné à une éternelle errance dans l'existence.