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Inédit
Tout public
Postface de Lawrence Block
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Alain Defossé
Paris : Calmann-Lévy, janvier 2015
272 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-7021-4460-2
Coll. "Robert Pépin présente"
Compassion
Même s'il est un écrivain protéiforme qui écrit plusieurs séries policières et des romans noirs uniques, Lawrence Block est surtout connu pour les différents volets composant la saga du détective Matt Scudder. Composée de plusieurs romans, cette série dresse le portrait extrêmement attachant d'un homme honnête, pris dans ses propres contradictions et qui tente de s'en sortir. Autour de lui, quelques figures éclairent son parcours : sa compagne, ancienne prostituée, un patron de bar, sorte de parrain local caché derrière son comptoir, et ses clients qui vont des clochards morts au coin de la rue jusqu'aux hauts dirigeants de la ville.
Mais les romans sont aussi des "extraits" de sa vie et, comme dans toute bonne biographie qui se respecte, il existe toujours des trous à combler, des événements explicatifs qui manquent pour la compréhension des choix des acteurs. Dans un souci de cohérence, pour répondre aussi à des commandes d'anthologistes qui permettent de garder le contact avec le public et de mettre du beurre dans les épinards, Lawrence Block a donc écrit ces nouvelles qui montrent diverses facettes de la vie de Matt Scudder. Rappelons qu'il a d'abord été policier alcoolique puis, suite à une bavure où il abattit une petite fille, il est devenu abstinent et détective privé sans bureau, au noir, parcourant tous les recoins de New York entre déductions logiques et parcours plus dur-à-cuire. Il a de plus changé d'épouse. Ces nouvelles vont donc refléter ces diverses périodes de sa vie, tranches du quotidien de la Grosse Pomme, empreintes d'humanisme, de reniements, de trahisons et de preuves d'amitié ou d'amour, bref empreintes de vie.
Quelques textes sont de facture très classiques comme le premier où Matt Scudder apprend qu'une barmaid, qu'il fréquente comme client, s'est jeté par la fenêtre de son appartement. Il mène l'enquête car cela lui semble étrange et il va découvrir, outre la rapacité humaine d'un amoureux de passage, le véritable assassin. Dans un autre, il comprend qu'il a été trahi par un client qui s'est servi de lui pour l'innocenter et va maquiller des pièces pour le faire condamner d'une autre manière. À l'inverse, une autre fois, il sait que la coupable a tué mais il juge qu'elle a bien agi et ne dira rien. Avec "Un moment d'égarement", nous revenons sur les débuts de sa carrière de flic, lorsqu'il voit son coéquipier détourner une preuve pour soulager la conscience d'une femme qui vient d'assister au suicide de son mari.
Quelques nouvelles se dépouillent jusqu'à même perdre toute notion d'intrigue policière. Elles deviennent des vignettes, des vitraux, des estampes, des descriptions d'un moment de grâce, de calme, des détails qui rendent plus proches de nous les personnages de cette comédie humaine new-yorkaise - le dernier soir où Ballou, le copain truand de Scudder ferme son bar, celui où il demande d'être son témoin pour son mariage.
L'ensemble du recueil devrait se déguster comme autant de petits tableaux de maître, un chaque soir, ou un par semaine, mais même les plus anecdotiques sont écrits avec soin, avec un souci du détail ou du dialogue qui fait mouche que le lecteur ne peut s'empêcher, comme devant une boite de chocolat ou un bon vin, de se dire : "Bon allez, encore un dernier pour la route !"
NdR - Le recueil comporte les nouvelles suivantes : "Par la fenêtre", "Un cierge pour la dame aux sacs", "Aux premières lueurs de l'aube", "Les Assistants de Batman", "L'Ange miséricordieux de la mort", "La Musique et la nuit", "À la recherche de David", "Let's get lost", "Un moment d'égarement", "Mick Ballou regarde l'écran vide" & "Une dernière soirée chez Grogan".
Citation
Ça me laissait une boule dans la gorge. Mais il suffisait de deux ou trois verres pour que la boule fasse moins mal.