Basse saison

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jeudi 21 novembre

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Roman - Noir

Basse saison

Assassinat - Corruption - Urbain MAJ lundi 14 septembre 2015

Note accordée au livre: 4 sur 5

Grand format
Inédit

Tout public

Prix: 25 €

Guillermo Saccomanno
Cámara Gesell - 2012
Michèle Guillemont (avant-propos)
Traduit de l'espagnol (Argentine) par Michèle Guillemont
Paris : Asphalte, septembre 2015
586 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-918767-49-7
Coll. "Fictions"

Quand l'été dort

L'Employé, précédent roman de Guillermo Saccomano aux éditions Asphalte, nous avait déjà séduit par sa qualité stylistique et son univers qui faisait froid dans le dos. Seulement, l'auteur argentin s'était contenté de cent soixante-dix pages et ne s'était attardé que sur un personnage. Avec Basse saison, il dresse le portrait de la station balnéaire de Villa Gesell à une période où il fait toujours froid. Et surtout il prend le temps de nous montrer par le petit coin de la lorgnette chacun de ses habitants dont il décrit les mauvaises habitudes avec un soin chirurgical.
Son personnage principal c'est Dante. Tout un programme. Lui est journaliste à El Vocero. C'est un peu le rédacteur de la rubriques des chiens écrasés et des gens oppressés. Et si la plupart des articles qu'il rédige sont déjà connus de la plupart de ses lecteurs, s'il n'était pas là, le bourbier politico-mafieux de la ville ne serait jamais perturbé. Il n'est guère poète - quoique - mais il s'ingénie à nous présenter sa Divine comédie. Car il s'en passe des choses à Villa Gesell. Au moins de quoi en écrire près de sept cents pages condensées qui confinent parfois à la répétition. Vaste roman choral qui interpelle, Basse saison s'arrête sur chacun des habitants en autant sinon plus de micro-fictions. Il happe le lecteur comme la rumeur les happe, eux, et les plonge dans la curie quand elle sous-entend que l'école privée catholique héberge en son sein des instituteurs pédophiles. Mais la rumeur enfle quand les travailleurs immigrés boliviens entendent parler de leurs conditions et de travail et de vie. Esclaves modernes condamnés à mourir sur le chantier des Tours du paradis où la sécurité est la dernière des motivations de promoteurs véreux. Pas un jour sans que des coups de feu ne soient échangés à la Virgencita. Est-ce l'œuvre des bandits péruviens ? Nul ne le sait vraiment : la vérité est souvent travestie. Et puis il y a le sexe, organe omniprésent du pouvoir incarné par trois jolies filles issues des bas-quartiers : Susi, Jackie et Adriana. Cette dernière peut-être plus que les autres aime le fric et déteste son mari. Mais elle est liée aux autres par son passé et par la crainte qu'elles suscitent chez elle. Crainte de tout perdre y compris la vie. Faut dire que mariées à des hommes "Kennedy", elles forment une fratrie des plus amères. Faut dire aussi que si son mari Julián est un être désemparé, il n'en est pas de même de son frère Alejo. Lui n'aime ni la faiblesse, ni le chantage. Lui est prêt à se comporter comme l'aîné de l'empire qu'ils ont bâti à coup de billets, de coups tordus et surtout de délits majeurs.
Basse saison, c'est le roman d'une ville gangrenée par une mafia familiale, une ville qui elle aussi est une grande famille. Avec ses rires, ses pleurs, ses craintes et ses hantises. Une ville régie par l'argent, la violence et le sexe. Parfois par tout ça à la fois. Mais Basse saison c'est aussi un récit aux multiples facettes imagées. Un récit ni pessimiste ni optimiste. Guillermo Saccomano observe la vie telle qu'il l'a laissée à l'abandon de la réalité. Un peu comme si chacun de ses personnages qu'il a créé avaient repris possession de leur âme et apprenaient à vivre ensemble. Un roman qui est le pendant d'un film génial, Quand la ville dort, et qui donc aurait pu s'intituler Quand l'été dort.

Citation

Y a-t-il plus grande humiliation pour un père qu'être vu par son fils à quatre pattes, le visage défait, complètement ravagé.

Rédacteur: Julien Védrenne lundi 14 septembre 2015
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