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Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (États-Unis) par Nadine Gassie, Océane Bies
Paris : Albin Michel, septembre 2015
438 p. ; 24 x 16 cm
ISBN 978-2-226-31930-2
Neiges d'antan
Vers la fin Revival, dernier roman en date de Stephen King, débarque Mary, une personne qui est la fille d'une certaine Shelley et qui va enfanter un Victor. Cela ne vous rappelle rien ? Pour ceux qui seraient uniquement fans de polars purs et durs, un indice supplémentaire : Frankenstein. Dans ce roman, il est aussi question de Lovecraft, de livres maudits et d'expériences compliquées pour tenter de découvrir ce qui se cache derrière la mort. Mais il y a bien longtemps que Stephen King a quitté les rivages du roman fantastique ou d'épouvante. À l'exception des chapitres finaux, le récit est typique de ce que rédige l'auteur du Maine depuis quelques années : une intrigue sur l'Amérique, sur l'enfance, sur le vieillissement et le temps qui passe, sur le besoin de retrouver sa jeunesse tout en sachant que c'est impossible, sur les fêlures de son pays, sur les classes moyennes et pauvres. On retrouvera donc le rock'n roll, les voitures et les prédicateurs. L'histoire tourne autour de deux personnages dans la petite ville de Harlow : l'un s'appelle Jamie. C'est un jeune garçon qui vit dans un village calme, entouré de l'affection de sa famille. Il deviendra musicien rockeur et drogué. Arrive un pasteur, jeune et fougueux, passionné d'électricité. Ce dernier va soigner son frère, mais va également péter les plombs, et clamer l'inexistence de Dieu après la mort de sa femme et de son enfant. S'il disparaît, il reviendra à intervalles réguliers dans la vie de Jamie.
Revival joue donc sur le sens du titre : ancien musicien, Jamie va revenir pour une fête d'anniversaire dans sa famille et rejouer des vieux standards ; le pasteur cherche à faire revivre ou rejoindre sa femme et son enfant. Et Stephen King dans tout ça ? Eh bien, il essaie de faire revivre le temps de l'innocence. Cela permet à l'auteur de décrire de belles scènes sentimentales comme retrouver un vieil amour, la quête obstinée du pasteur, des moments de nostalgie quand le guitariste retrouve les membres de son premier groupe, voire son premier amour, ou bien quand il découvre le bébé de sa nièce. Mais Stephen King sait aussi être mordant lorsqu'il décrit les grands shows américains de télé-évangélistes. Ainsi, avec une ironie mordante, il montre son prédicateur devant quelques personnes dans l'église du début, puis bonimenteur sur les fêtes foraines avant de gigantesques séances de guérison - mais nous sommes chez Stephen King et les guérisons cachent d'autres choses plus obscures. Revival est aussi un roman apaisé. Et s'il y a des références aux grands maîtres de la littérature fantastique, décrits surtout dans un final qui évoque le genre par petites touches, l'air de rien, il évite le gore et le grandiloquent. Le roman est avant tout l'évocation du parcours chaotique d'un personnage, de quelqu'un que Stephen King aurait peut-être aimé être : un musicien qui passe de l'excitation à l'apaisement, du chaos des jeunes années à la sérénité de la vieillesse.
Citation
Et tout le monde a besoin d'un petit miracle ou deux, juste pour se prouver que la vie est plus qu'un long pèlerinage du berceau à la tombe.