Contenu
Poche
Réédition
Tout public
Traduit de l'anglais par Élise Champon
Paris : Le Masque, septembre 2015
286 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-7024-4252-4
Coll. "Agatha Christie", 49
Écran de fumée
En convalescence suite à un accident d'avion, Jerry Burton se rend avec sa sœur Joanna dans le petit village de Limstock avec pour seuls mots d'ordre : repos, calme et récupération. Là-bas, ils louent Little Furze, la maison d'Emily Barton tenue d'une poigne de fer par la très conservatrice bonne Partridge. Ils ne tardent pas à faire la connaissance des notables des lieux : le docteur Griffith et sa sœur, le notaire Symmington, le révérend Calthrop et leurs femmes respectives. Et puis il y a Megan, la fille d'un premier mariage qui erre dans la maison du notaire, qui est transparente aux yeux de ses parents et surtout mal fagotée. Mais le calme ne va pas tarder à être mis à mal par toute une salve de lettres anonymes qui essaiment leur poison. Les ragots sont infondés mais le mal est fait. Suite à une nouvelle lettre, Mrs. Symmington se suicide... par empoisonnement. Puis c'est une de ses servantes qui est retrouvée dans un placard : elle a été assommée et a eu le crâne transpercé par... une broche à rôtir. Pour l'inspecteur Nash et aussi pour les détectives en herbe de circonstance, Jerry et Joanna, elle avait vu quelque chose concernant le suicide de sa maîtresse. Bien sûr, l'enquête semble piétiner, mais peu à peu des éléments se mettent en place sans qu'aucun des protagonistes de cette intrigue d'Agatha Christie ne semble en mesure de les percevoir. Alors, après plus de deux tiers d'un récit comme souvent satyrique chez la Reine du crime, Miss Marple fait son apparition. Elle n'est que le catalyseur de Jerry, et se base uniquement sur deux de ses remarques : "Il n'y a pas de fumée sans feu" et "Un écran de fumée". L'intrigue est particulièrement ficelée et retorse quoi que fort simple. Il est amusant de noter que le roman a été écrit en 1943 : la même année sort sur les écrans Le Corbeau, d'Henry-Georges Clouzot, film qui se base sur l'Affaire de Tulle (de 1917 à 1922 Angèle Laval répandra cent dix lettres anonymes avant d'être confondue). La traduction d'Élise Champon, certes révisée, use du terme "Corbeau" à bon escient mais son utilisation pour ce roman en fait un anachronisme regrettable. Mais l'ingénieuse romancière propose également l'un des premiers profilers en la personne d'un inspecteur venu tout spécialement de Londres et qui a déjà eu affaire à une jeune femme adepte de la lettre anonyme. Il dresse d'ailleurs un portrait général de la suspecte. Malheureusement, ce personnage intéressant est vite oublié par la romancière. Elle, peut être taxée d'homophobie par ses remarques acerbes et répétées sur Mr. Pye dont on devine sans peine l'inclinaison sexuelle et qui est sans cesse considéré comme une femme. La Plume empoisonnée, sur fond de comédie sentimentale, est donc un récit original, mais loin de la perfection avec des atermoiements d'une romancière qui au final sort l'un de ses personnages récurrents d'on ne sait où (elle a trotté depuis St. Mary Mead) pour mettre un terme aux agissement d'un esprit particulièrement machiavélique.
Citation
Dans les romans, quand un détective se déniche un collaborateur sur le terrain, ledit collaborateur est les trois quarts du temps l'assassin.