Abattez les grands arbres

En réalité, je regrettai de ne pas avoir une gigantesque presse pour réduire en bouillie des gens aussi moches. Certains jours, comme aujourd'hui, le monde était plein de gens moches, jusqu'à la nausée.
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Roman -

Abattez les grands arbres

Ethnologique - Politique - Drogue MAJ jeudi 19 novembre 2015

Note accordée au livre: 3 sur 5

Poche
Inédit

Tout public

Prix: 13,5 €

Christophe Guillaumot
Pau : Cairn, octobre 2015
372 p. ; 18 x 12 cm
ISBN 978-2-35068-396-6
Coll. "Du noir au Sud"

Des arrangements avec la vérité

Pendant longtemps, au cœur de nombreuses enquêtes policières, les références à la Deuxième Guerre mondiale, à ses exactions et au trou noir qu'avait constitué la présence des camps de concentration, servaient de point d'ancrage. Avec le temps, il devient difficile de pouvoir utiliser cet événement. Mais ce moment indicible, qui permet de positionner les gens et les horreurs, a fabriqué des "petits" et malheureusement des résurgences. La guerre civile du Rwanda avec son tristement célèbre génocide a aussi été l'une de ces remontées glauques. Un certain nombre de victimes, et aussi de coupables, se sont réfugiés en Europe. Certains essaient de se reconstruire tandis que d'autres tentent de se faire oublier. Mais tout cela est bien loin des préoccupations de Renato, qui, malgré son prénom, est kanak. Policier de base, dans une unité chargée de la répression des stupéfiants, il doit surtout faire avec les affaires de corruption de l'équipe dans laquelle il se trouve. Pourtant, lors d'une arrestation, il découvre dans l'appartement voisin, un couple de Rwandais massacrés à coups de hachette. Le seul à même de pouvoir lui donner une quelconque information se trouve alors être le dealer arrêté. La suite de l'enquête plonge le policier dans des abimes de réflexion : coupables potentiels et victimes portent le même nom (même si c'est visiblement un nom courant) ; certains ont eu des passeports de victimes mais sont surtout dans le camp des anciens tortionnaires et autres assassins. Un sacristain qui fait partie d'un collectif d'aide aux Rwandais surveille ce petit monde des réfugiés, mais quel est son rôle exactement ? Surtout, tout devient un peu plus compliqué pour Renato. D'un côté , il doit jongler avec son équipe qui pense qu'il va les dénoncer à l'inspection des services, et d'un autre; il doit partager ses informations avec une policière qui travaille pour les services secrets français - à ce propos, le lecteur est en droit de se demander quel est vraiment le rôle de ces services : découvrir le coupable ou empêcher que la participation française ne soit dévoilée ? Dans le même temps, il rencontre son âme sœur, ce qui vient parachever la complexité de sa vie.
Le mélange entre une intrigue centrée sur un personnage attachant et la façon dont il découvre petit à petit l'envers du décor, les manipulations dont les enquêtes, l'histoire et la vie des gens, permettent un rythme soutenu et intelligent. Même si l'intrigue reste classique (la dénonciation de la monstruosité humaine et de la raison d'État, les petites bassesses), le traitement de Christophe Guillaumot à travers un policier de base, un individu lambda qui tente juste de faire son travail le plus correctement possible, est solide et documenté, afin de faire d'Abattez les grands arbres - slogan équivalent au Rwanda à l'euphémique solution finale des nazis -, un roman noir intéressant et captivant.

Citation

Lui, il n'est pas comme les autres. S'il acceptait de devenir l'un des leurs, il ne pourrait plus retourner sur la tombe de sa mère.

Rédacteur: Laurent Greusard jeudi 19 novembre 2015
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