À mains nues

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Roman - Thriller

À mains nues

Sportif - Mafia - Apocalyptique MAJ mardi 08 mars 2016

Note accordée au livre: 3 sur 5

Poche
Réédition

Tout public

Prix: 8 €

Paola Barbato
Mani nude - 2008
Traduit de l'italien par Anaïs Bokobza
Paris : J'ai lu, février 2016
540 p. ; 18 x 11 cm
ISBN 978-2-290-10659-4
Coll. "Thriller", 11365

Marx et Sade sur un ring

Le roman À mains nues de Paola Barbato narre la trajectoire surprenante de Davide, un homme de bonne famille. Enlevé au sortir d'une fête, il est jeté dans une camionnette et roué de coups. C'est une bataille à mort avec un inconnu qui s'engage dont il sort vainqueur, mais il découvre qu'il est à présent aux mains d'une organisation qui va l'utiliser pour d'autres combats de gladiateurs des temps modernes. Entraîné comme un sportif dans une usine désaffectée, il va peu à peu, sous les directives de Minuto, un ancien tueur devenu entraîneur sportif d'un genre particulier, gravir les échelons de ce monde souterrain où les combats humains sont l'objet de paris et de spectacles. Il va même diversifier ses activités en aidant un homme riche à assouvir sa vengeance en liquidant sauvagement l'amant de sa femme, et en participant à la réalisation d'un snuff movie dans lequel on va lui offrir des jeunes filles kidnappées qu'il viole et tue.

Chez les philosophes comme Hegel ou Marx, il existe une dialectique du maître et de l'esclave. L'un ne peut exister sans l'autre et, l'un comme l'autre, sont dépendants de manière différente mais somme toute bien réelle. Dans À mains nues, il y a des relations de ce genre entre Davide et Minuto. Comme cela est évoqué dans les arts martiaux, entre autres, il faut attendre le moment où le disciple (il n'y a pas loin du disciple à l'esclave) surpassera le maître. Cette relation existe aussi entre la mafia qui utilise Davide et Minuto : ceux-ci risquent la mort s'ils désobéissent mais les truands ont besoin d'eux pour continuer à régner et à gagner de l'argent. Comme dans tout rapport humain, les rapports de force sont ambigus et complexes car l'esclave peut réclamer un peu plus lorsqu'il devient indispensable à son maître, tout comme la chanteuse préfabriquée peut s'émanciper de son imprésario. Et le maître peut s'enticher de son esclave. Le roman est empreint de dialectique car chaque victoire sur un adversaire est l'occasion aussi de devenir un gladiateur plus intéressant pour son clan et donc de réclamer des récompenses. Chaque victoire pourrait rapprocher de la liberté, d'une fuite possible, mais Davide a pris goût à détruire et à tuer. On offre même la liberté à Davide, mais il ne sait trop qu'en faire et il comprend vite qu'en fait Minuto a ouvert son esprit : Davide aime ce qu'il fait ! Tout va culminer dans une sorte de jeu de téléréalité. En effet, dans cette usine désaffectée, dix gladiateurs vont se retrouver enfermés, sous la surveillance de caméras. La porte ne s'ouvrira que pour l'un d'entre d'eux.

Le roman pourra paraître long car Paola Barbato prend son temps pour poser son personnage, les silhouettes des autres acteurs du texte, pour décrire la lente transformation d'un humain lambda en une brute épaisse et inhumaine, en la découverte de sa face cachée, pour montrer que la violence du monde ne fonctionne pas sans le plaisir sadique du Jeu des humains. Le style rend compte du temps qui passe, de la lenteur de la formation, n'explicite pas tout car évidemment Davide, prisonnier, ne sait pas grand-chose, ne comprend pas tout ce qui lui arrive. Mais, à l'image d'Usual suspects le roman se savoure dans ses dernières lignes, ses derniers mots.

Citation

Les coups se succédaient, parfois forts, parfois non. Il frappait là où il pouvait, dans le ventre, au thorax, sur les jambes, dérangé par les mouvements du camion.

Rédacteur: Laurent Greusard mardi 08 mars 2016
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