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Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'anglais (Nouvelle-Zélande) par Fabrice Pointeau
Paris : Sonatine, février 2016
568 p. ; 22 x 15 cm
ISBN 978-2-35584-335-8
Bagatelles pour des massacres
Il est particulièrement difficile de renouveler le genre lorsque'on décide d'écrire un thriller sur fond de tueurs en série. Il est tout aussi difficile d'avoir un angle différent. Mais le Néo-Zélandais Paul Cleave a choisi une manière excentrée, en s'appuyant sur un humour noir féroce qui en fait quelque peu un auteur à part. Il situe l'intrigue dans l'endroit qu'il connaît le mieux, à savoir Christchurch, en Nouvelle Zélande, une ville devenue l'un des centres de l'enfer sur terre avec ses tueurs en série omniprésents, ses policiers corrompus et ses nombreux vices impunis. La ville oscille sans arrêt entre des vagues de chaleur et des pluies torrentielles. De nombreux passages sont des piques sur les habitants ou la politique locale, sur le mauvais état des services, sur cette ville décrite comme une sorte de jungle urbaine livrée aux pires instincts. Même lorsque l'on est exclu de la police pour avoir liquidé, sur la demande d'un autre policier, une jeune femme, on s'étonne de ne pas avoir droit immédiatement à avoir sa carte de détective privé ! De même une partie de l'histoire tourne autour d'un médium qui n'héiste pas à utiliser ses adjoints - tous anciens policiers -, pour obtenir des informations qui lui permettront d'avoir des "visions" et de renforcer son aura d'extra-lucide télévisuel. L'histoire se centre autour de plusieurs personnages. Joe (qui est souligné par le titre anglais où il est qualifié de victime !) est l'un des pires tueurs en série de la ville. Arrêté, il croit qu'il va être libéré car il dit qu'il est innocent. Cynique, sans aucune empathie, il essaie de survivre aux pièges de la prison. Il croit recevoir des messages de sa petite amie Melissa (une autre tueuse en série qu'il aime car elle lui a arraché un testicule !) pour l'aider à s'évader. Autour de lui, on découvre un policier chassé de la police, travaillant pour le médium, et qui veut à tout prix coincer Melissa. Cette même Mélissa qui cherche à faire évader son homme avec un plan tordu à souhait. On peut ajouter des gardiens de prison qui font manger des sandwichs effrayants à leurs détenus, une jeune fille attachée et retenue pour être la babysitter du bébé de Joe et Melissa.
Le roman est noir et n'hésite pas à virer dans le grotesque : Melissa se promène avec un faux ventre pour faire croire qu'elle est enceinte et cette proéminence cache une arme à feu. Très symptomatique, le procès de Joe est l'occasion d'une grande manifestation pour rétablir la peine de mort et c'est l'occasion pour les étudiants de se promener en ville dans les déguisements les plus incongrus et se saouler. Les tueurs pratiquent le rasoir d'Occam : quand la solution la plus simple est de dégommer quelqu'un parce que cela les arrange, ils le font naturellement. De même, si pour libérer Joe, il faut poser deux bombes en pleine rue et les faire exploser pendant une manifestation pour provoquer une panique et aider à leur fuite, Melissa ne se pose pas de questions.
Mélange de réalisme rude et d'un côté exagéré - les coups pleuvent, le sang gicle régulièrement et les personnages sont blessés ou meurent sans aucune considération de la part de Paul Cleave -, comme un mélange entre les rêves de Quentin Tarantino et les cauchemars après la vision de Sin City. Un prisonnier modèle fonce dans l'hénaurme et fait rire (jaune) en forçant le trait avec jubilation.
Citation
Elle sort une des barres chocolatées de sa poche et commence à la manger. Elle apprécie la montée de sucre presque autant qu'elle apprécie de voir Derek mourir. À savoir, beaucoup.