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Rome brûle
Grand format
Inédit
Tout public
Traduit de l'italien par Serge Quadruppani
Paris : Métailié, septembre 2016
304 p. ; 22 x 14 cm
ISBN 979-10-226-0513-7
Coll. "Noir - Bibliothèque italienne"
Une fable noire sans pitié !
Giancarlo De Cataldo et Carlo Bonini, grands connaisseurs des arcanes politiques et criminels relatifs à la ville de Rome, unissent leur talent pour en raconter l'histoire. Ils ont commencé avec Suburra (Métailié, 2016) qui se déroulait dans le début des années 2010. Ils continuent, dans le présent roman, avec des événements très actuels.
La situation a évolué en peu de temps. Les anciens maîtres occultes de Rome sont en prison. Samouraï est en régime d'isolement très dur et son emprise sur les gangs se relâche, bien que Sebastiano Laurenti, son héritier, veille sur ses intérêts. C'est l'occasion, pense Fabio Desideri. Il commence son ascension en faisant massacrer l'un des chefs de chantier de Danilo Mariani, le patron d'une entreprise qui a remporté le grand chantier d'une nouvelle ligne de métro il y a quelques années. Martin Giordino dit er Tedesco (L'Allemand), le nouveau maire de Rome veut éliminer la corruption de la Capitale. Il bloque tous les versements "pour avancement des travaux". Le pape François annonce solennellement l'organisation d'un Jubilé extraordinaire autour de la miséricorde de Dieu. Sebastiano, qui tente de maintenir la pression sur les différentes mafias de la ville, est déstabilisé par une dette pour coke de Danilo. Elle le met en situation de faiblesse vis-à-vis de Fabio. Mais, il s'intéresse de près à la belle Chiara, une députée qu'il tente de séduire.
Alors que le pape, qui a exilé le cardinal Tempesta à Washington, nomme pour suivre les travaux de Jubilé, le plus jeune évêque de Rome, Martin désigne le sénateur Adriano Polimera, un communiste, pour coordonner les différents chantiers. Tout est alors réuni pour une confrontation terrible entre la bulle mafieuse et celle de la probité, entre deux voyous qui veulent, chacun à leur manière, régner sur la ville. Qui peut gagner et à quel prix ?
Les romanciers livrent une reconstitution parfaitement réaliste des appétits que suscite l'annonce d'événements amenant des millions de personnes dans un même lieu et les mannes financières qui en découlent. Ils articulent leurs intrigues autour du BTP, un secteur qui se prête facilement, semble-t-il, à toutes les formes de trafics, de magouilles, le nouvel eldorado des mafias. Entre les projets de bétonnage du bord de la mer jusqu'à Rome, dans Suburra, et les infrastructures à développer dans ce roman, la pègre y trouve son compte. Face à elle, comme dans la réalité, une poignée d'idéalistes qui rêvent d'une ville gouvernée et conduite avec probité.
Giancarlo De Cataldo et Carlo Bonini mêlent plusieurs intrigues dans leur récit, chacun des protagonistes lancé sur son parcours, un parcours pas toujours très net où les ambitions se télescopent, se contrarient. L'intrigue repose sur les épaules des deux principaux protagonistes que sont Sebastiano et Fabio. Le premier est, par intérim, le maître de Rome, le second veut se hisser à sa hauteur. Mais les motivations des personnages sont bien différentes. Si l'un veut entrer dans l'illégalité la plus totale, l'autre veut en sortir et rêve d'une vie...
Les auteurs mettent en scène une nouvelle espèce de truands, des individus qui ne sont pas issus de lignées criminelles, des arrivistes qui voient dans cette voie la possibilité rapide de satisfaire leur but ou leurs goûts pour la richesse et le pouvoir.
Les femmes sont peu présentes dans le roman sauf Chiara dont ils dressent un magnifique portrait. C'est une femme qui a également des comptes à régler. Mais, si ce portrait est attachant, ils en brossent un autre qui est moins attirant, reluisant, celui des édiles de Rome où tout se résume à la fin en "bouffe, nichons, paillettes. Boucan, excès et plouquerie".
Rome brûle est un roman au contenu prenant, passionnant, voire addictif, d'autant qu'il se rattache à des faits authentiques à peine teintés de fiction. Assurément l'un des meilleurs livres de la rentrée.
Citation
Un homo novus, dans tous les sens, perdu dans un souk. Il était fatal que le milieu traficoteur, copineur, débraillé, réagisse mal, comme devant un envahisseur barbare.